Il y a bien longtemps, l'empereur Shâh Jahân vit son épouse bien-aimée Mumtaz Mahal mourir en couche. Fou de chagrin, il érigea un immense mausolée en son honneur dans la région d'Agra en Inde. Ce palais, véritable bijou architectural connu sous le nom de Taj Mahal, est aujourd'hui considéré comme l'une des nouvelles merveilles du monde.


Bien sûr, une telle histoire empreinte de romantisme ne pouvait qu'inspirer les artistes du monde entier. C'est pourquoi en 1954, le célèbre producteur-réalisateur Alexander Korda décide d'en faire un film intitulé The Pearl of Love...



De David Lean à Fritz Lang



Pour s'occuper de ce projet pharaonique, Korda engage l'un des réalisateurs anglais les plus doués de sa génération, David Lean. Ce dernier est envoyé en Inde pour faire des repérages et gardera un souvenir impérissable de ce pays aussi majestueux qu'énigmatique. Cependant, la mort de Korda quelques temps plus tard et la reprise du projet par l'indien Bishu Shen entraîne l'évincement de Lean, remplacé au pied levé par Fritz Lang.


Le metteur en scène allemand voit dans ce projet une bouffée d'air frais, lui qui est cantonné depuis plusieurs années aux studios anxiogènes de Hollywood et à ses polars de série B. Fidèle à son habitude perfectionniste, il se met à se renseigner sur l'Inde, regardant énormément de documentaires et allant même faire des recherches au British Museum à Londres. Il s'envole ensuite sur place, dans la bruyante Bombay. S'ensuit un long périple où il visite les immenses villes de New Delhi et Jaipur mais aussi les grandioses sites historiques que sont le Taj Mahal et la ville abandonnée de Fatehur Sikri.


Malheureusement, le sort s'acharne sur le film The Pearl of Love. En effet, le budget estimé pour le réaliser est bien plus élevé que les moyens dont dispose Bishu Shen. Ce dernier n'a alors d'autres choix que d'enterrer définitivement ce projet, au grand dam de Lang, condamné à retourner dans sa morne Californie.



Le Tigre du Bengale



Cependant, l'Inde n'en a pas fini avec Lang. En effet, il existe en Allemagne un producteur du nom d'Artur Brauner dont le rêve est simple : rendre à son industrie cinématographique la grandeur qu'elle avait avant la guerre. Pour y arriver, il veut réaliser des remakes des grands classiques allemands. Parmi ceux-ci figure Le Tigre du Bengale dont la première version réalisée par Richard Eichberg est sortie en 1938. Pour cette nouvelle mouture, Brauner veut un metteur en scène allemand de renommée mondiale et choisit donc bien évidemment Lang.


Toutefois, ce dernier est un peu réticent à l'idée de reprendre contact avec son pays natal qu'il a fui en 1933 à cause de la montée du nazisme. Mais l'occasion est ici trop belle. Elle lui donne en effet l'opportunité de quitter pour de bon Holylwood et surtout, de ressusciter son projet de réaliser un film sur l'Inde. Il accepte donc la proposition de Brauner et ré-utilise énormément les travaux préparatoires qu'il avait menés sur The Pearl of Love.


Son objectif premier avec ce film est avant tout de rendre hommage à la grandeur de l'Inde et à son exotisme. Pour ce faire, il tourne énormément de scènes en extérieur, que ce soit dans des jungles, des déserts ou d'immenses palais indiens.


Avec un tel soucis du détail, Le Tigre du Bengale se révélera donc être un véritable joyau mais surtout, la conclusion d'une fantastique odyssée au coeur des contrées du Taj Mahal, la perle de l'amour.

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le 9 juin 2020

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