Coproduction entre l'Italie, l'Espagne et la France, tournée principalement en Grande-Bretagne dans la langue de Shakespeare, Una Lucertola con la Pelle di Donna est selon son propre cinéaste une pièce maîtresse de son oeuvre, ce que ne viendront pas contredire les nombreux admirateurs du maître italien.


De par ses multiples influences, allant aussi bien d'Alfred Hitchcock au pop-art en passant bien entendu par le giallo, Une Lucertola con la Pelle di Donna est un film étrange et foisonnant, aux innombrables facettes, un véritable bouillon de culture, aspect renforcé par les différents lieux de tournage à travers l'Europe et bandes sonores, chacune proposant une ambiance légèrement différente selon les doublages.


Bien plus que son enquête policière finalement peu importante, la force du film de Fulci réside dans l'univers fantasmagorique se déployant sous nos mirettes ébahis, le cinéaste multipliant les visions oniriques et cauchemardesques dans le but de retranscrire avec le plus d'impact possible la psyché ravagée de son héroïne. En résulte un thriller puissamment sexuel et inconfortable, à l'atmosphère délicieusement baroque et décadente, aux saillies gores et cul du plus bel effet.


L'occasion pour le cinéaste de régler ses comptes avec une bourgeoisie qu'il semble haïr au plus haut point, tout comme il dégomme une psychanalyse de comptoir et un mouvement hippie dont les idéaux n'auront pas survécu longtemps face à la cupidité, aux drogues et à la luxure. Tous en prennent pour leur grade dans un gigantesque bal de l'horreur parfaitement mené par le cinéaste, même si l'on regrettera par-ci par-là quelques longueurs et un casting loin d'être charismatique.


Extrêmement exigeant et particulier, à ne pas mettre entre toutes les mains, Una Lucertola con la Pelle di Donna est un thriller transalpin puant le sexe, la débauche et la mort par tous ses pores, un cauchemar éveillé moite et sanglant, au potentiel érotique énorme, qui mérite d'être (re)découvert à sa juste valeur.


P.S: à noter que l'édition bluray publiée par Lechatquifume a eu l'idée géniale d'inclure une version VHS du film, ce qui devrait ravir tous les amoureux de ce format aussi nostalgique que techniquement foireux.

Gand-Alf

Écrit par

Critique lue 1.2K fois

18
4

D'autres avis sur Le Venin de la peur

Le Venin de la peur
oso
7

Un reptile sur le divan

Quand Fulci s’approprie le giallo, il le fait avec sa propre sensibilité, sans forcément prêter attention aux codes qui régissent le genre. Point de tueur au sens premier du terme, point de passages...

Par

le 17 nov. 2014

16 j'aime

3

Le Venin de la peur
Teklow13
8

Critique de Le Venin de la peur par Teklow13

Fulci est le cinéaste de la transformation de la chair et du pourrissement des corps. Il traite ce sujet dans quasiment tous ses films en le déclinant sur le fond comme sur la forme. On retrouve...

le 13 avr. 2012

8 j'aime

Le Venin de la peur
Redzing
7

Giallo passe-partouze

Jusqu’à présent, les gialli de Lucio Fulci m’ont agréablement surpris, s’écartant plus ou moins des conventions du genre pour tenter quelques audaces. En l’occurrence, « Una lucertola con la pelle di...

le 26 juil. 2023

5 j'aime

5

Du même critique

Gravity
Gand-Alf
9

Enter the void.

On ne va pas se mentir, "Gravity" n'est en aucun cas la petite révolution vendue par des pseudo-journalistes en quête désespérée de succès populaire et ne cherche de toute façon à aucun moment à...

le 27 oct. 2013

268 j'aime

36

Interstellar
Gand-Alf
9

Demande à la poussière.

Les comparaisons systématiques avec "2001" dès qu'un film se déroule dans l'espace ayant tendance à me pomper l'ozone, je ne citerais à aucun moment l'oeuvre intouchable de Stanley Kubrick, la...

le 16 nov. 2014

250 j'aime

14

Mad Max - Fury Road
Gand-Alf
10

De bruit et de fureur.

Il y a maintenant trente six ans, George Miller apportait un sacré vent de fraîcheur au sein de la série B avec une production aussi modeste que fracassante. Peu après, adoubé par Hollywood, le...

le 17 mai 2015

209 j'aime

20