Un OFNI difficile à décrire. Mystérieux, intrigant, troublant, dérangeant. Le doux parfum britannique et fantastique des 70s de "The Wicker Man" plane sur ce film, et c'est un excellent point.
Même s'il est parfois difficile de saisir le sens exact de ce qu'on voit, voire de l'ensemble, il y a un grand nombre de symboles passionnants qui sont le signe d'une œuvre de qualité. C'est aussi un peu l'antithèse de "Essential Killing", qui était tout aussi symbolique mais d'une précision et d'une rigueur immenses. Ici, on baigne dans un certain flou, sans que ça ne soit un obstacle au plaisir ou à la compréhension de la démarche.


Tout d'abord, Francis Bacon, bien sûr. Au centre du film (ou presque), du moins au centre du studio d'enregistrement de John Hurt. La référence directe à Head VI (https://blog2010a.files.wordpress.com/2011/09/bacon-head1.jpg), pour le côté agressif et effrayant du cri, et non pas défensif ou signe de peur comme habituellement. Mais aussi la position de sa femme, filmée quelques instants durant en noir et blanc et représentant la reproduction (en noir et blanc) de Paralytic Child Walking On All Fours (https://pbs.twimg.com/media/CDpj9niWAAAdS8l.jpg) présente elle-aussi dans le studio. Ces ponts avec Bacon renforcent la dimension angoissante du film, qui plutôt qu'une opposition entre deux forces (John Hurt versus Alan Bates, tous deux géniaux), semble observer la réaction d'une tierce personne se trouvant piégée entre des personnages incarnant respectivement des formes de soumission et de domination.


Il ne faut toutefois pas être réfractaire à l'approche de Skolimowski, puisque le film dans son ensemble tente de brouiller les pistes (et y parvient), au niveau du style comme du sens, le récit empruntant de nombreux chemins de traverse. Ajoutons à cela une trame narrative obscure, des expérimentations sonores vraiment étranges (Peter Strickland fait petit joueur à côté avec "Berberian Sound Studio"), un montage aussi expérimental que surprenant, avec des parallèles troublants mais sensés sous forme d'inserts rapides. Et, surtout, une partie de cricket dans un hôpital psychiatrique qui sombre dans le chaos le plus total.


Un film barré, difficile à appréhender, mais vraiment très appréciable.


[Avis brut #14]

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le 2 août 2015

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Morrinson

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