Fort d’un buzz positif acquis sur la croisette, le dernier essai de Romain Gavras (Fils de Costa) débarque sur nos écrans auréolé d’une réputation de Snatch à la Française finalement assez logique au vu du passé de clippeur émérite de son réalisateur. Pourtant au-delà de son esthétique léchée et de quelques scories visuelles tout droit sorties d’un clip de PNL, Le Monde est à toi se révèle être bien plus qu’un film de gangster fun et rigolard.
Ainsi, en plus d’une histoire d’embrouille sur fond de bicrave drôle ( mention spéciale au running gag sur les Illuminatis !) et fort bien rythmée, il y a le parcours initiatique d’un brave gars qui cherche à échapper à son quotidien morose mais aussi et surtout aux griffes d’une mère castratrice (Isabelle Adjani formidable). Véritable moteur émotionnel du film, ce personnage touchant doit beaucoup à son interprète, le méconnu Karim Leklou (LA révélation du film) qui déploie une palette de jeu extrêmement riche durant les 1h30 que dure le récit.
La matriarche toxique et l’ex beau-père paumé interprétés respectivement par Adjani et Cassel (qui n’a jamais été aussi émouvant), bénéficient eux aussi d’une écriture soignée et de vraies belles scènes.
On ne peut malheureusement pas en dire autant de tous leurs petits camarades à l’instar du love interest du héros à laquelle le métrage permet peu de sortir de son statut de grosse micheto ou des deux Mohamed qui malgré l’énergie assez folle de leurs interprètes ne parviennent pas à être autre chose que deux grosses cailleras souvent hilarantes mais assez clichées.
Par ailleurs, on regrettera que le script ne développe pas plus certaines intrigues comme celle autour des migrants et l’embryon de discours politique qui en découle ou certains personnages comme le mystérieux mafieux Zaïrois qui aurait fait un méchant bien plus charismatique que cette bande de hooligans échappés d’un film de Guy Ritchie.
Ces quelques défauts n’empêche toutefois pas le Monde est à toi de faire souffler un vrai vent de fraîcheur dans le paysage cinématographique français. Et ce, grâce à l’inventivité de sa mise en scène qui a le bon goût de ne jamais tomber dans l’hystérie inhérente à la plupart des films centrés sur des petites frappes et à quelques protagonistes très attachants.
De plus, rares sont les œuvres francophones qui permettent à des jeunes de banlieue d’être de vrais beaux personnages de cinéma et un film qui utilise Balavoine et Voulzy au côté de Booba et de Kaaris lors de passages jubilatoires ne peut pas être totalement mauvais !