Quand Quentin rend hommage à Tarantino

Tarantino fait partie de ces réalisateurs rarissimes qui n'ont jamais raté un seul film et même lorsque ceux-ci étaient moins bons.
Il fait aussi partie des réalisateurs qui ont une grosse base de fans, ce qui lui permet de s’adonner à quelques facilités.
En fait,c’est très difficile de critiquer quelqu’un comme Tarantino et gare à ceux qui s’y essaient, sous peine de recevoir en pleine figure un essaim d’énergumènes qui défendront corps et âme leur messie.
Ceci dit, je peux comprendre cela. Comment ne pas avoir de la sympathie pour ce cinéphile qui s’est imposé comme un cadre indétrônable à Hollywood ? J’ai moi-même beaucoup d’affections pour QT et je suis le premier à le défendre contre ceux qui font partie de l’autre clan, ceux qui descendent ses films quoiqu’il arrive, juste par principe.
Malgré tout, quand c’est pas bien, il faut le dire aussi.

Après avoir réalisé d’excellents films au début de sa carrière ( Réservoir dogs, Pulp fiction et Jackie Brown ) il semblerait que Tarantino entreprend un chemin plus prudent depuis Kill Bill. Reprenant les ingrédients qui marchent et rendant au passage hommage à certains réalisateurs chers à son coeur, il avance petit à petit, réalisant des films avec une mise en scène impeccable mais aussi avec quelques redondances énervantes qu’on ne peut pas nier.
Puis vint "Django", un succès tant public que critique et j’avais moi-même clamé haut et fort que Tarantino était à la quintessence de son art, qu’il s’agissait de son chef d’oeuvre absolu dans une filmographie déjà bien fournie.
A l’annonce de la sortie de son huitième film “ Les 8 salopards “ je me demandais si QT allait commencer un nouveau cycle avec de nouveaux thèmes, de nouveaux personnages, de nouvelles idées, etc…
Après avoir vu la bande annonce, cela me semblait mal embarqué, j’avais l’impression qu’il voulait s’essayer à un "Django 2.0" mais pas de souci à se faire de ce côté là… "Les 8 salopards" n’a strictement rien avoir avec Django que ce soit dans le choix du casting ( même si Tim Roth a un air de Christoph Waltz dans celui-ci… Enfin je trouve), dans le propos de base, dans le rythme, dans la temporalité, dans les décors, etc…
Bref, il n’a strictement rien avoir, si ce n’est qu’il s’agit d’un autre western.
Alors, qu’est ce qui cloche vous allez me demander ? Et bien je vais vous le dire dans les lignes qui vont suivre…

L’idée de réaliser un Huis-clos avec des personnages aussi dérangés était une bonne idée de base mais qui fut, à mon sens, mal exploitée.
Le premier point noir du film, c’est le rythme. Bon dieu, qu’est ce que c’est mou et inintéressant par moment. Habituellement, j’aime quand un réalisateur opte pour un rythme posé mais il faut qu’il y ai des coups d’éclats pour contre balancer la lenteur du film. C’est d’ailleurs ce qu’il se passe dans la plupart des films de Tarantino mais pas dans celui-ci.
Il faut attendre le dernier tiers du film pour voir un peu d’action et ce qu’il s’y passe avant est souvent dénué d’intérêt.
Durant 2h, vous aurez droit à des dialogues interminables entre les protagonistes du film et ceux-ci sont souvent ennuyeux et pas très drôle… Alors oui, il y a de temps à autre un bon dialogue qui nous est présenté mais ils sont rares.
En fait, ce qui m’énerve le plus c’est la durée du film qui aurait pu être de 1h30 mais qui au lieu de cela dure deux fois plus longtemps.
Parce que oui, quand on est un réalisateur influent et avec de la notoriété, on se sent obligé de faire des films de 3h mais ça n’a parfois aucun sens et c’est le cas ici.
Ceux qui disent qu’un bon huis-clos de 3h est faisable sont de mauvaise foi. Le principe d’un huis-clos est de faire monter la tension au fur et à mesure que le film se déroule pour finir en apothéose mais on ne peut pas le faire en 3h, c’est impossible.
Vous vous rappelez la scène de la cave dans Inglourious Basterds qui se finit en pétoir magistral ? Elle était terrible cette scène, car la tension montait, montait, montait, pour finir par un bordel sans nom.
Ben imaginez que cette scène dure 3h et vous aurez à peu de chose près le résultat de “ Les 8 salopards “.

Le truc qui me met aussi en pétard, c’est la suffisance de Tarantino. On est habitué à un schéma qui se répète dans la plupart de ses films et qui se termine par une scène d’action souvent très réussie et jubilatoire.
“Les 8 salopards “ n’échappe pas à la règle sauf que j’ai senti le final très mal amené. J’avais l’impression que c’était forcé, comme s’il s’était obligé à nous foutre une scène d’action car “ c’est comme ça que ça se passe dans un Tarantino “.
Selon moi, il n’y a rien de pire quand un réalisateur tente par tout les moyens, même quand ce n’est pas nécessaire, par y mettre une scène qu’on a l’habitude de voir dans sa filmographie.
Même chose pour les flashbacks d’ailleurs.
Dans “ Les 8 salopards “ c’est très mal foutu, et fait avant tout pour rallonger la durée du film. Excusez-moi, mais quand un flashback n’ajoute rien de crucial à l’histoire, qu’il dure 20 minutes et qu’en plus il survient à la fin du film, j’appelle ça du foutage de gueule.
Je trouve même que dans le cas présent, le flashback nuit au film car il aurait gagné à ce que certains personnages gardent une part de mystère. Enfin, ça c’est très subjectif…

Enfin, je voulais juste pousser un petit coup de gueule et je suis conscient d’avoir seulement mis en avant les points négatifs.
Est ce que le film est raté ? Non, loin de là…
Tarantino a une maîtrise de la mise en scène assez exceptionnelle et son huitième long métrage ne déroge pas à la règle.
Il y a quelques coups de génies également, mais je ne veux rien spoiler donc je ne dirai rien de plus.
Je sais que le film aura son succès et que mon avis se perdra dans les limbes mais je voulais seulement montrer mon agacement face à la suffisance de QT. J’espère qu’il se remettra en question et que les avis se rapprochant du mien ne seront pas si rare que cela.