Apres son long périple américain les ailes du désir ramène Wim Wenders a son port d’attache, l’Allemagne, et a sa capitale. Berlin, ville ouverte et fermée en même temps. Berlin, cité cosmopolite qui polarise toutes les contradictions de l’époque, fascine Wenders qui la scrute du haut du ciel, avec une caméra en état d’apesanteur, planant en compagnie des anges. La première partie, à l’allure d’un documentaire, nous fait découvrir des lieux à valeur de symbole comme la Staastsbiblithek et ses artères lugubres, des bunkers couverts de graffitis et des terrains vagues ou rodent des enfants perdus. Images d’un pays en crise, coupé en deux par un mur d’intolérance a la liberté.
Mais ce constat lourd d’amertume cache une fable. Si les anges de Wenders sont incapables d’intervenir directement sur l’avenir de la cité meurtrie, ils ne se révèlent pas moins les signes avant-coureur d’une mutation qui ne tardera pas à s’accomplir. Apres leur passage, le mur de la honte va s’orner de fresques fleuries, le sourire d’une enfant chassera les spectres du passé. Ce passage progressif d’un sévère « état des choses » au registre de l’effusion romantique, qui n’est pas sans parenté avec l’esthétique expressionniste, s’opère grâce à un artifice technique de haute virtuosité : au noir et blanc des séquences d’ouverture, symbole d’un monde figé dans ses souvenirs, se superposent peu à peu des couleurs vives, éclatantes, celles de l’amour et des lendemains qui chantent. Témoin lucide d’un pays non encore réunifié, Wenders se veut aussi, dans cette œuvre prémonitoire, le chantre d’une renaissance spirituelle.