Wakamatsu, c'est un ancien yakuza devenu cinéaste après avoir passé 6 mois en prison. C'est le genre de type capable de te tourner un film en quatre jours, avec deux bouts de décors, un budget qui lui permet tout juste de s'acheter un sandwich à la pause-déjeuner et des acteurs amateurs.


Aidé de son fidèle compagnon Jūrō Kara, qui joue le rôle principal dans le film, le voilà de retour après son bon (mais un poil surestimé à mon goût) Quand l'embryon part braconner pour un nouveau pinku-eiga expérimental et sans limite. Du moment qu'il y a du sexe, les producteurs accordent leur feu vert et Wakamatsu est libre de s'en donner à cœur joie sur sa mise en scène. Sans scénario, Wakamatsu et Kara décident de l’orientation du récit au cours du tournage (ce qui se sent au visionnage).


Sans surprise, Les anges violés est tout sauf un pinku-eiga traditionnel : les scènes de sexe laissent rapidement place à des scènes de tortures sadiques (bien souvent hors-champ, les cris étant assez éloquents pour informer le spectateur), les quelques scènes de dialogues sont filmées par une caméra qui ne cesse de s'attarder sur les cadavres pissant le sang, et des séquences d'un onirisme cauchemardesque ponctuent le film pour exprimer le mal-être et le sentiment d'infériorité du personnage principal. Wakamatsu n'est donc pas le genre à caresser son spectateur dans le sens du poil, mais plutôt à le mettre constamment dans une situation d'inconfort.


Passé toute cette audace formelle, je trouve que le film sonne un peu creux : la volonté de psychanalyser le personnage est assez ridicule (surtout quand la mise en scène nous enfonce l'importance de l'enfance dans sa psyché avec un marteau), et la fin mettant sur un même pied la répression militaro-policière et le détraqué sexuel aurait clairement mérité plus de nuance.


En bref, l'oeuvre de Wakamatsu c'est toujours un peu foutraque et souvent pas très fin, mais ça a le mérite de penser le cinéma comme un outil qui bouscule les spectateurs et qui nous offre des tranches de visions à la fois poétiques, violentes et érotiques.


PS : si le cinéma japonais vous intéresse, vous pouvez venir piocher dans ma liste https://www.senscritique.com/liste/Les_oublies_du_cinema_japonais/1704611

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le 1 sept. 2017

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