Rencontre du troisième type.


Qui ? En 1975, 76, aurait pu imaginer que Steven Spielberg allait devenir un réalisateur de films connotés à l'enfance, tels Hook, E.T. ou producteur des Goonies et le Secret de pyramide. Malgré le pitch mignon de Sugarland Express et ses héros innocent, pas grand monde tant ses trois premiers films, en incluant Duel pour la télé mais en excluant Columbo, sont fait de bruits et de fureurs.


E.T.


Ce qui est toujours marrant avec ce type, c'est qu'en fonction de l'age de chacun, un énorme panel de spectateurs peut avoir un film référence différent sans qu'il y ait un sentiment de répétition dans la création de l'auteur mais sans jamais sortir des cordes disponibles à son arc dès le départ. Le plus souvent, les gens nés comme moi au milieu des 70's ont pour référence E.T., ma femme, plus jeune, c'est Jurassic Park, d'autres plus jeunes auront le soldat Ryan ou Minority Report sans oublier tous ceux biberonnés par Indy en personne.
Je voulais aller voir E.T. au cinéma mais ma mère n'a pas voulu, de ce fait, c'est un peu plus tard que j'ai découvert Steven à la télé, en noir et blanc, dans une séance du mardi soir, puisque j'ai pu le voir jusqu'au bout, dans un film qui fait peur avec un titre trop bien les dents de la mer.


Faut dire que dans les années 80, y avait encore une insouciance complète, on te passait le film, comme ça, en prime time, sans trop avertir que ce n'est pas recommandé aux enfants qui tiennent à leurs rares soirées télés autorisées et qui sont fatalement attirés par ce genre. Mais les parents étaient aussi désarmés face aux produits qui envahissaient l'écran qui se libérait du joug Gaulliste.
Résultat, j'ai passé des années à ne pas vouloir sortir de mon lit lorsque la lumière était éteinte, à imaginer qu'un requin se cachait sous mon lit, prêt à arracher le moindre petit bout d'orteil qui dépasserait.


Les aventuriers de l'arche perdue


Alors, c'est connu, le talent de Spielberg, c'est de ne pas trop montrer le requin conjugué au talent de John Williams pour te faire une musique des plus flippantes digne d'un 20h, mais sous son couvert de film grand spectacle, je pense que je n'exagère rien si je dis que Jaws est le film d'horreur ultime. Alors tatati tatata, oui mais bon avant, tin nin nin nin oui mais bon après, tralala et depuis ouin ouin ouin, ok, l'horreur existe sous toutes ses formes au cinéma mais ici, on a affaire à un film qui traite l'horreur sous toutes ses formes, du moins les plus générales.
Le milieu maritime, l'humain n'y est plus trop à son aise, même s'il apprécie de s'y repaitre, il reste un peu pataud avec ses jambes hors du champs de vision et les plans sous marins sont des plus mémorables.
Le milieu terrien, car là aussi, il y a des requins et pas des moindres, prêts à sacrifier quelques congénères pour se fabriquer une piscine privé.
Le milieu familial, le plus sensible car avant d'être le chef de la sécurité, Brody est père. Le drame personnel pointant le bout de son nez, il se décidera à partir à la chasse.
Le milieu naturel, avec le sous entendu, du plus en plus de place réservé à l'homme et moins aux animaux, préfigurant le désastre climatique qui nous attend quand l'homme n'aura plus assez de place pour son espèce.
Même la guerre est présente dans l'histoire de Quint, survivant de l'USS Indianapolis. Quint qui nous refroidit une deuxième fois l'échine (...) quand il se remémore les coups de couteau pour se défendre
Bien sûr, l’océan, la bête sauvage, la viande crue, ces petites choses qui nous ramènent à nos instincts les plus primaires, les plus caverneux.


Duel


Bien que savoureuse et maitrisée parfaitement, la partie de chasse en mer, se révèle, avec un minimum de recul, un peu farfelue dans le sens où le pitch de Jaws 4, une affaire personnelle, décrit précisément la scène. Mais c'est encore l'occasion de faire intervenir un peu d'horreur à travers les yeux de Richard Dreyfuss enfermé dans sa cage en métal, voire même un peu de gore quand le requin avale Quint. Le tout après une longue séquence de suspense savamment distillé et avant un final salvateur, même si on imagine toujours un autre requin venir leur chatouiller les orteils pendant leur retour à la nage.


Always


Le film d'horreur ultime, surtout, car Jaws s'inscrit dans une réalité possible. Pas qu'un requin ait élu pour cible une plage avec l'ambition de couler l'économie touristique locale mais les accidents avec les requins existent et cette perspective qui peut toucher homme, femme ou enfant, reste ancrée dans l'imaginaire de tous.


Parait-il que l'absence du requin à l'image est dû à des pannes répétitives des répliques animatroniques qui ont forcé Steven à réviser ses planches et instiller la présence de la bête autrement. Si on prend l'exemple du film avec des fourmis géantes, qu'on a eu super peur en les voyant, ce n'est pas en voyant des fourmis rikiki que l'on va paniquer. Dans Jaws, c'est différent, le danger apparait à la simple approche de la mer, soit la même chose que l'on voit lorsque l'on va se baigner, ce qui influence forcément nos associations d'idées dès que l'on décide à aller un peu plus loin que la pataugeoire côtière immonde et surpeuplée.


Steven Spielberg est le premier nom de réalisateur que j'ai connu et je pense que bon nombre de gens de ma génération et des suivantes partage cette anecdote. J'ai appris son nom avec les dents de la mer et quelque soit le film de sa part que je découvre, il y aura toujours un requin. Que ce soit dans le T-rex ou le vélociraptor, un tuyau de douche, un scientifique en combinaison, un tripod ou un spectacle d'extermination de robots. Chacun sait que son cinéma peut basculer ne serait ce qu'un instant dans l'horreur, et le bougre sait en jouer

Toshiba
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le 18 févr. 2019

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