Deuxième long métrage de Steven Spielberg alors seulement âgé de vingt-huit ans, Les dents de la mer est une adaptation du roman de Peter Benchley. Il sort sur les écrans américains en juin 1975 après huit longs mois de tournage. Le succès est immédiat et planétaire : le film bat des records d'entrées, remporte trois Oscars (meilleur montage, meilleure musique et meilleur son) confirmant le talent de cinéaste de Steven Spielberg qui après un succès mitigé avec Sugarland Express rentre définitivement dans la cour des grands.

Alors pourquoi près de 40 ans plus tard le film continue tant de faire parler de lui alors que se sont succédé depuis pléiade de film de requins bénéficiant eux de la technologie numérique voir de la 3D pour les plus récents d'entre eux (Shark Night 3D en exemple). Et bien simplement parce que rien n'a jamais égalé l'ingéniosité et l'intelligence narrative dont à fait preuve Spielberg à l'époque. Tout d'abord l'utilisation de la caméra subjective pour plonger le spectateur aux côtés de Jaws et la formidable utilisation de la musique composée par John Williams pour le personnifier et participer au suspens. La force du film tient également au fait que l'histoire est portée par trois acteurs de talents : Roy Sheider, Robert Shaw et Richard Dreyfuss.
Sheider incarne le chef de la police Martin Brody, récemment arrivé à Amity island et qui souffre d'une peur de l'eau...ironie dramatique dont Steven Spielberg va aisément se servir dans le film. Robert Shaw alias Quint, le vieux loup de mer misogyne qui offrira un grand moment de cinéma en improvisant un monologue sur l'Indianapolis. Et enfin, Richard Dreyfuss, Matt Hooper, le scientifique océanographique qui a du mal à se faire respecter. Si, au premier abord, ces héros semblent très caricaturaux, Spielberg démontre à plusieurs reprises qu'il ne les a pas mis dans des cases. Ainsi, Matt Hooper démontre son côté baroudeur en exhibant ses cicatrices, Martin Brody surmonte sa peur de l'eau et triomphe du requin alors qu'à l'inverse, Quint, que le spectateur avait fini par apprécier pour ses chansons et sa hargne à vouloir tuer le monstre finit tué. Le film regorge également d'une bonne dose d'humour contrastant avec les moments de suspens et d'horreur, ce n'est pas pour rien que certaines répliques sont devenues cultes « That's some bad hat harry » ou encore « You're going to need a bigger boat » énoncée par le chef Brody à la vue du monstre de huit mètres.

Bref, les choix d'acteurs et des dialogues font que Les dents de la mer reste bien au-dessus de ses suites ou de la majeur partie des films de terreur aquatique tournés depuis, souvent mal interprétés et sacrifiant scénario et mise en scène pour n'offrir que du spectaculaire et de l'hémoglobine.

Certains diront que le terme « horreur » pour le film de Spielberg est un peu fort, mais il faut évidemment se replacer dans le contexte. Certes le requin mécanique peut aujourd'hui faire sourire, mais, la force du film tient justement au fait que nous le voyons peu mais qu'il nous terrifie, comme le fera plus tard le Alien de Ridley Scott. La force de la suggestion prend dans ces films tout son sens et certains cinéastes ont d'ailleurs repris le concept du film de requins en s'en inspirant assez brillamment. C'est le cas de Open Water de Chris Kentis et The reef de Andrew Traucki deux jeunes réalisateurs qui ont choisi de se rapprocher de l'aspect documentaire en s'inspirant de fait divers et en tournant avec de vrais requins. L'ensemble très réussi, joue plus que jamais sur la suggestion puisqu'avec de vrais requins les contraintes techniques sont plus fortes.
Steven Spielberg a donc ouvert les portes d'un nouveau genre qui semble encore rameuter les foules et inspirer des cinéastes. Le réalisateur prouvera d'ailleurs quelques années plus tard avec Jurassik Park qu'il est bien un grand maîtres des thriller animaliers.

Les dents de la mer est un film à voir et à revoir surtout à cette époque de l'année, ne serait-ce que pour se faire des frayeurs lorsque l'on aura les pieds dans l'eau.
SarahLehu
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le 1 juil. 2013

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Sarah Lehu

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