Décembre 1945. Mathilde Beaulieu, jeune interne, épaule Samuel, médecin référent lors d'une mission de la Croix-Rouge en Pologne. Une jeune religieuse polonaise, en pleurs, l'interpelle et l'incite à visiter un couvent dans les terres reculées. Mathilde y découvre le pire : des religieuses enceintes, violées quelques mois auparavant par des soldats russes.

Anne Fontaine s'attaque pour la première fois au drame historique, en s'appuyant sur des faits ayant eu lieu en Pologne en décembre 1945 : 25 religieuses furent violées dans un couvent par des soldats russes, 20 d'entre elles furent assassinées. Cette histoire terrible ne serait qu'une partie de l'iceberg. Des "viols de masse" auraient été commis par l'armée russe en Europe et en Pologne pendant la 2ème guerre mondiale, viols autorisés par les hiérarchies, comme "récompenses" des efforts énormes fournis par les soldats pour faire reculer l'armée allemande depuis la bataille de Stalingrad. Leurs auteurs n'eurent pas l'impression de commettre des crimes. Le dossier est d'autant plus sensible que les autorités russes n'ont jamais reconnu ces viols de masse, de surcroît peu étudiés par les historiens.
En 2013, un étudiant des Beaux-Arts polonais dépose illégalement à Gdansk, près d'un bâtiment consacré à l'Armée Rouge, une sculpture représentant une femme enceinte violée par un soldat Russe. Le Kremlin considéra ce geste comme "une insulte aux 600 000 soldats morts pour l'indépendance de la Pologne". Par la suite, les députés soviétiques voulurent déposer un projet de loi, interdisant et sanctionnant la critique de l'Armée Rouge durant la guerre. Ce projet prévoyait amendes et emprisonnement, mais ne vit pas le jour...
Plus largement, Anne Fontaine dénonce les violences faites aux femmes durant les guerres, victimes collatérales, dont la souffrance est le plus souvent négligée ou considérée comme mineure.
La caméra d'Anne Fontaine s'attarde sur les visages et les regards. Elle étudie le rapport des religieuses à la foi, à la maternité, le rapport à leur corps, ce qui en fait un film unique, où la photographie magnifique ravit autant que la performance des actrices.

EvaScardapelle
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le 26 juil. 2021

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Eva Scardapelle

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