Un des meilleurs films de Don Siegel et un des rôles les plus complexes et inhabituels de l’acteur. Un huis clos en pleine guerre de sécession, dans un collège pour jeunes filles qui recueille un soldat blessé. Celui-ci va séduire toutes les femmes une à une, quel que soit leur âge, en trichant, en mentant, en manipulant. Mais qui est vraiment la proie de qui ? That is the question ?


Clint Eastwood est surprenant dans ce rôle de salaud au visage d’ange. Et remarquable. C’est la seule fois à ma connaissance qu’il joue un tel rôle. Il y interprète remarquablement l’homme qui commence par jouer au chic type et qui, progressivement, se met à révéler sa vraie nature et ses vraies intentions. Il nous offre une mue très crédible, en commençant avec ses poses de soldat sans peur et sans reproche et en finissant dans un jeu de colère folle, psychopathique. Son regard de chevalier arthurien finit par céder le pas à une attitude de concupiscence cynique et de désir malsain des plus réussies.


Les autres actrices (Géraldine Page, Elisabeth Hartmann, Jo Ann Harris…) sont très convaincantes, qui dans le rôle d’une directrice cachant un secret d’alcôve des plus embarrassants, qui dans le rôle d’une pensionnaire ayant le feu quelque part, qui dans le rôle d’une jeune enseignante qui veut bien mais ne peut pas, refreinée qu’elle est par un manque total de confiance dans la gent masculine (en l’occurrence parfaitement justifié dans ce cas. Et c’est bien dommage pour elle qu’elle ait baissé la garde si vite…).


La mise en scène de Don Siegel rend passionnant cette atmosphère lourde de sens. On ne s’ennuie pas une seconde dans cette atmosphère lourde et angoissante, dans laquelle la musique de Lalo Schifrin fait ressortir à merveille la promiscuité malsaine de cette montagne magique qui semble ne vivre que par procuration une guerre qui pourtant se déroule devant son portail. La dégradation progressive de l’ambiance du pensionnat est très bien soulignée. On participe vraiment à l’action et on reste glacé par la fin du film, qui nous montre que la monstruosité peu prendre des formes très diverses, y compris sous les rubans, dentelles et les crinolines de jeunes filles dont les fleurs peuvent s’avérer bien vénéneuses.

Chicago
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le 13 sept. 2016

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