Polar noir des plus classiques, Les Sentiers de la Perdition frappe avant tout par sa froideur et son absence totale d'humour - même noir -, tandis que son réalisateur s'était fait connaître avec American Beauty, un premier film "chef-d'oeuvre" qui en regorgeait...


Mais ici c'est la pègre ; celle de la prohibition de Rock Island (près de Chicago) et d'une fratrie d'origine irlandaise où Sullivan, le fils non naturel du boss (excellent Paul Newman), verra la vie de sa petite famille basculer le jour où son frère particulièrement violent (convaincant Daniel Craig alors peu connu) abattra sous les yeux du fils de Sullivan un "employé" de la maison. Et si Tom Hanks a du mal à paraître crédible au départ, je dois bien admettre qu'on finit par s'y faire, même si on devine aisément l'objectif sous-jacent de rendre ce gangster plus sympathique avec la tronche gentillette de l'acteur. Par ailleurs, l'idée du gamin, quand même très jeune, de se faufiler dans la bagnole de son père pour connaître son métier me paraît un peu téméraire... Oui, je spoile toujours un peu le début, mais ça ne dure jamais bien longtemps ! ;)


En même temps, avant d'arriver à ce tournant dramatique, on s'ennuie un poil, malgré la photographie sombre et classieuse à l'image des magnifiques décors et costumes d'époque. Par contre, la musique c'est quasiment la même que dans le film précité, et ça colle franchement moins... Quant aux dialogues, pas grand-chose de formidable non plus, en dehors du "Pourquoi tu souris tout le temps ?" lancé par un gamin à son oncle lui répondant : "Tout ça, c'est à se pisser dans son froc." Parce que la grande force du film de Sam Mendes réside selon moi dans la froideur et la radicalité des scènes qui suivront. Violentes, parfois malines (l'excellent coup de la lettre apportée en main propre), et la tension d'urgence se font réellement ressentir.


Après, on aura droit à quelques apparitions intrigantes d'un photographe de scènes de crime assez spécial incarné par Jude Law. Sullivan se rendra compte qu'il ne connaissait que trop peu ses gosses, mais on ne creusera pas plus que ça. Et alors que l'on croira se diriger vers un final vengeur des plus classiques, Sam Mendes abattra l'une de ses meilleures cartes au coeur d'un splendide petit paradis côtier irlandais, malgré un dénouement quelque peu larmoyant dont on se serait bien passé.


Trop de classicisme tue le classicisme, mais Les Sentiers de la Perdition s'avère finalement un bon polar maîtrisé, âpre et tendu, cohérent et bien joué.

RimbaudWarrior
7
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le 28 mai 2016

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RimbaudWarrior

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