Pour ou contre la ré-ouverture des maisons closes ? La prostitution c'est mal ou c'est bien? Et les sex-toys ? Les films pornos c'est malsain?

Ces questions, pseudo-débats et propositions de lois me revenant aux oreilles plus régulièrement encore que mon cycle menstruel, je me suis dis, qu'un jour, il faudrait bien avoir un avis sur tout ça. Et n'ayant pas la prétention de m'y connaître, je me suis dis : voyons ce qu'ils en disent, les autres gens, là-dessus.
Passé les « débats » télévisés où nos chers hommes politiques brandissent soudainement leur féminisme (si, si, je vous jure, Copé est féministe) pour défendre les prostituées battues et déportées des pays de l'Est par des méchants russes, face à qui les piliers de comptoirs du PMU s'offusquent en se demandant bien où pourront-ils dès lors, se vider les couilles, je me suis dis que le mieux était tout de même de demander l'avis aux principaux(ales) intéressé(e)s. C'est alors que ce film est parvenu jusqu'à moi, ce qui m'a d'ailleurs évité de me rendre jusqu'au Bois de Boulogne pour faire mon petit sondage.

« Les travailleu(r)ses du sexe » se veut à l'image de son titre large, neutre et sans prétention.
Si j'ai particulièrement apprécié ce film, c'est parce qu'il est intelligent, m'a fait réfléchir, m'a apporté une nouvelle façon de voir les choses : celle des travailleurs du sexe. Parce que finalement, si ce sont tout de même les premiers concernés des sujets de débats, ce sont bien souvent les derniers interrogés dessus. Et pourtant, ils en ont des choses à dire.
Ce documentaire n'a pas peur de faire parler tous ceux, de près ou de loin, qui sont associés au travail du sexe et sont tout à fait à l'aise avec. Le film amène ainsi une variété, tant dans personnes interrogés que dans les sujets abordés : JM Carré laisse aussi bien la parole aux prostituées qui assènent les lois Sarko sur le racolage, qu'aux gérants de sex-shops qui nous content l'histoire du sex-toy, aux stips-teaseuses qui maitrisent et parlent de leur travail mieux les businessmans qui viennent les voir, aux acteurs pornos qui se sentent plus à l'aise à l'image qu'au téléphone rose parce qu'ils ne sont pas en contact direct avec les clients, aux travailleurs des pays voisins sur les pratiques et règlementations -bien souvent plus progressistes qu'en France-, mais aussi aux clients plus ou moins assumés, mais respectueux et amateurs, bien souvent « victimes » également de ce tabou régnant autour des clichés du business du sexe : les hommes âgés, les handicapés, les femmes....

Bien au-delà de l'anecdote personnelle de chacun, sont également posées des questions de société : qu'est-ce qui dérange tant dans le sexe, et dans l'argent qui va avec ? Pourquoi cette industrie est à la fois acclamée et rejetée ? Où en est la société, notre sacro-sainte société tant éclairée et ouverte avec la sexualité, et notamment celle des femmes ? Quels sont les intérêts politiques en jeu ?

On pourrait critiquer Carré pour ne vouloir montrer que des travailleu(r)ses du sexe qui sont bien dans leur peau et heureux de leur travail. Mais ce serait, de mon point de vue, mal comprendre son message ; parce que TF1 nous assomme assez « d'envoyés spéciales » spécial « prostitution ou le mal du siècle », Carré contrebalance ces clichés en humanisant ces sujets : leurs sentiments, leurs réels et propres visions de leur « monde », mais aussi du monde en général, de leurs envies, mais sans pour autant occulter le côté moins glamour de leur métier. Somme toute, comme dans n'importe quel milieu. Parce que oui, que l'on soit prostitué ou ouvrier du bâtiment, que l'on utilise ses mains ou sa queue, il y a dans les 2 camps des gens heureux et des esclaves. Et c'est eux qui le dise.

Par un documentaire plein d'intelligence, d'humour mais aussi de sensibilité, d'humanité où le sexe est désacralisé sans pour autant être malmené, on prend alors conscience que le manichéisme ambiant qui rode perpétuellement autour de ces sujets est poussiéreux et à mille lieux de la réalité.

Merde, en 2010, qu'est-ce qui dérange tant les gens dans le fait se faire du fric avec une fesse alors qu'il est normal de le faire risquant l'argent de petits épargnants ?
Sans la jouer donneur de leçons stéréotypés à la Michael Moore, Jean-Michel Carré pose de vrais questions qui permettent une avancée réelle dans un débat sans cesse faussé par des moralités de bonne vertu et tabous sociologiques formatés.
Zilb
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le 1 nov. 2010

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Zilb

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