Les trois jours du Condor est un film d’action dynamique, à la fois populaire, divertissant et ambitieux dans sa critique politique et institutionnelle. Le film est construit avec une tension graduelle, soulignant ainsi le piège qui se referme de plus en plus sur son personnage central. Esthétiquement il fleure bon les années 70 – en particulier la musique, mais son sujet reste très actuel, à savoir la prévalence des intérêts économiques face aux valeurs d’un pays et au bien commun.
Pollack joue également magistralement sur les échelles avec des décors monumentaux et iconiques pour les lieux de pouvoir et des décors le plus anonymes possibles pour les appartements et rues, soulignant que tout citoyen peut par erreur ou non devenir un ennemi de son propre État tout-puissant.
Le scandale du Watergate a éclaté un 1 an à peine avant la sortie de ce film et on ressent son influence, on entre définitivement avec les trois jours du Condor dans cette période où les États-Unis doutent d’eux même : méfiance et désillusion envers l’État et ses instituions, notamment la CIA, soupçon de corruption, abus de pouvoir… Sydney Pollack entérine la fin du rêve américain avec ce film hautement politique. Si l’intrigue de départ n’est pas forcément très crédible, elle reste dans le spectre des probables et c’est surtout l’atmosphère qui se dégage du film qui compte le plus. Le citoyen lambda n’est plus protégé et la vérité et le sens de la justice ne sont plus des garanties, et ne sont plus la priorité des institutions.
Le personnage de Redford est lui crédible, ce qui compense les faiblesses du pitch. Il ne se transforme par du jour au lendemain d’un analyste de bureau en super agent de terrain badass (oui films d’actions récents c’est de vous que je parle). Son peu d’expérience vient de son service militaire, mais il agit avant tout en amateur.
Si j'ai peu aimé la relation entre Redford et Dunaway, qui vire un peu trop vite au syndrome de Stockholm avec cette scène d’amour assez grotesque, l'ensemble du casting est bon. Robert Redford offre une très belle prestation d’homme piégé, mais ma préférence va à l’excellent Max von Sydow et son flegme.