Un couple new-yorkais s'ennuie dans leurs vies professionnelles et sur un coup de tête, décident de tout quitter, de tout vendre, et de faire un road-trip à travers l'Amérique au volant d'un camping-car.

Bien que le film soit de 1985, il reflète ô combien les années Reagan, où l'argent comptait plus que tout, les apparats de la richesse, les biens que l'on détient, pour une Amérique qui aimait bander ses muscles. Albert Brooks en fait, sous couvert d'une comédie, quelque chose de très violent contre le capitalisme, avec ce duo qu'il joue accompagné de Julie Hagerty. Dans ce voyage apparemment sans fin, les limites de la liberté qu'ils défendent tant, en hommage au film Easy Rider qu'ils adorent, capotera assez vite, car 1985 n'est pas 1969. Et cela, ils vont le payer très cher...
Je suis même surpris que Brooks ait pu, semble-t-il, faire le film qu'il voulait, et qui reflète un miroir extrêmement déformant, et dont la conclusion serait que la liberté n'existe plus, et qu'il faut rentrer dans le rang.

Tout comme Modern Romance, le précédent film du réalisateur, Lost in America est un peu un joyau secret du cinéma américain des années 1980, régulièrement cité par des grands nomme Edgar Wright, James L.Brooks ou encore Larry David, et oui, c'est remarquable. A la fois dans l'écriture, mais aussi dans la mise en scène. Je prends pour preuve un fabuleux plan-séquence qui montre le personnage joué par Albert Brooks, qui travaille comme designer dans une agence publicité, et promis à prendre la place du sous-directeur : la caméra va le suivre de l'appel de sa secrétaire jusqu'au bureau de son patron, mais filmé comme en fait s'il allait à l'échafaud au fur et à mesure qu'il arrive à sa destination. Quant à Julie Hagerty, elle incarne aussi cet envie de changement, accompagnant son mari dans son projet fou jusqu'à vouloir acheter une maison en bois avec l'argent de la vente de leur demeure. Elle va faire un geste, sans trop en dire, qui va tout relancer sur leurs belles utopies.

Comme je le disais, Lost in America est carrément un hommage à Easy Rider, jusqu'à reprendre Born to be wild, ce qui va aussi leur sauver la mise lors d'une rencontre avec un policier ultra-fan du film de Dennis Hopper, mais au fond, qu'on soit en 1969 ou en 1985, la conclusion est la même, et le cynisme du texte final est là pour nous le rappeler : le rêve doit rester tel quel, qu'on soit riche, pauvre, ou épris de liberté.

Passé un peu inaperçu à sa sortie, diffusé en salles en France plus d'un après, le film a acquis depuis un statut qui dépasse probablement ce qu'il fut en 1985, pour devenir aujourd'hui un formidable documentaire sur les années Reagan.

Boubakar
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le 17 mai 2021

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