Tebé or not tebé
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L'ambition, c'est bien. Ça nous fait avancer, ça éveille notre regard et ça peut donner naissance à d'immenses œuvres cinématographiques. Tout le monde est jaloux de Kubrick et son 2001, l'Odyssée de l'Espace, car le bonhomme a été si visionnaire et a fait preuve d'une telle maîtrise qu'il bouleversât les codes de la science-fiction et du cinéma en général pour des décennies. En 2014, deux réalisateurs veulent faire leur propre 2001 : Nolan a été plutôt bien reçu avec Interstellar, mais le Lucy de Besson l'a beaucoup moins été.
Il y a de bonnes idées à la base du film, mais rien ne colle. L'idée d'un personnage incarnant la connaissance-même, et finissant par interagir avec des notions abstraites telles que le temps, ont été traitées également dans Interstellar ; seulement, les notions abordées dans le film de Nolan ont été méticuleusement étudiées, afin de garantir la cohérence du propos, et donc la qualité du film.
Dans Lucy, le scénario est complètement torché. Évidemment, le principe des 10% d'utilisation du cerveau a été largement démenti depuis longtemps, et par conséquent, tout ce qui en découle devient ridicule, étant donné que plus rien n'est crédible. On peut toutefois accuser le film d'avoir alimenté les spéculations fantasmagoriques des plus crédules en répandant des idées reçues.
Et des fantasmes, il y en a ! Lucy part loin, très loin, trop loin ! Après une introduction passable, qui rythme bien le film dès le départ, le personnage de Scarlett Johansson change de comportement, et devient un mélange de tous les X-Men : elle lévite, a des réflexes parfaits, ressens tout (sauf la douleur et la compassion ?), lit dans les pensées, voyage dans le temps, contrôle la télé (il y en a aussi un dans les X-Men), fait taire les chiens, change de cheveux sans mettre de perruque, se transforme en Venom, et elle sait même conduire sans avoir fait ses 20 heures de conduites obligatoires. Impossible de tout énumérer, on comprend vite que ça va partir en cacahuètes, et chaque surenchère devient presque nanardesque.
Ce côté nanar, associé au fait que Luc Besson sait tout de même réaliser des scènes d'actions, rend le film pas si désagréable à suivre. Il est court et rythmé, et par conséquent jamais ennuyant. Les prestations des acteurs ne sont pas catastrophiques, ce sont plutôt les personnages qui sont mal écrits, car ils sont soit extrapolés et agaçants (Scarlett Johansson), soit fades (Morgan Freeman), soit on se fiche que le personnage soit joué par un gros acteur (Choi Min-sik).
Malgré ses images que l'on aurait pu retrouver dans Samsara ou Koyaanisqatsi et ses références grossières à La Création d'Adam et même à 2001, les ambitions du film ne sont concrétisées avec vraisemblance et crédibilité. Lucy veut vraiment être un bon film, il essaye, mais il n'y arrive pas.
Faire son 2001, ce n'est pas facile ; c'est pourtant bien la notion de surhomme qui est abordée ici. Mais quand j'entends "1 + 1 n'a jamais été égal à 2, il n'existe aucun nombre, aucune lettre", ou "le temps, c'est l'unité", comme s'il s'agissait de révélations incroyables ou de vérités irréfutables... Je me dis que soit je ne suis pas assez intelligent pour saisir toutes les dimensions du propos du film... Soit le souci est ailleurs.
Créée
le 31 août 2020
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