Il y a des films fondateurs et des réalisateurs pionniers. Fritz Lang et son 'M' sont de ceux là.
Il faut tout d'abord monter dans sa machine à remonter le temps et se positionner en 1931. C'est l'entre deux guerres, la crise de 1929 n'est pas loin et les bouleversements immenses qu'elle a engendrés font le lit d'un nazisme naissant.
Le cinéma est en noir et blanc, la synchro son est approximative et la mise en scène est encore toute imprégnée du cinéma muet.
Apparait alors ce film. L'histoire est somme toute assez simple, bien que l'implication de la pègre dans la résolution de l'intrigue est déjà novatrice en soi.
Mais surtout, l'ambiance ! Par quelques plans millimétrés et avec la rigueur temporelle d'une montre Suisse, j'ai été happé par l'univers noir de Fritz Lang. Le travail de réalisation est immense, certains plans sont tout simplement hors du temps (La contre plongée sur le commissaire lors de sa conversation téléphonique est d'une audace incroyable pour l'époque). Mais comme il ne faut pas perdre complètement le public en route, le jeu d'acteurs reste parfois tout imprégné du cinéma muet, comme ces postures exagérées d'attentes ou de surprise (reprises avec bonheur dans OSS 117!) qui étaient propres à l'expression des premiers films.
Lorsque je lis certaines critiques, je souris. On peut ne pas aimer, ne pas rentrer dans cet univers, mais quand on réalise combien ce cinéma, cette mise en scène a été pillé, utilisé, détourné dans le cinéma actuel, il me semble faire état d'un bien piètre respect vis à vis des origines du cinéma. De même, on peut ne pas s'esbaudir devant les œuvres exposées au Louvre, mais les qualifier de nulles, grossières, chiantes (LOL et ptdr...) me parait idiot sinon dangereux, car à ignorer l'histoire, on s'expose aux risques de l'avenir.
Sincèrement, je pense que tout amateur de cinéma se doit de voir 'M' au moins une fois dans sa vie.