Le Plagiat, Le Remake, Le Reboot, mais aux 6 Oscars !

Spoilers inside



Tout l'monde veut s'allumer, tout l'monde veut se la mettre
C'est la fin des haricots, y'a plus d'lovés.
93 Hardcore ! Levez les bras si vous êtes forts.
Ma banlieue Nord veut des gros sous,
Pourtant nos mains sont dans la boue.



93 Hardcore - Refrain




Introduction



J'ai finalement décidé de regarder Fury Road. Lors de sa sortie, tout le monde en parlait sur SensCritique, et moi : j'en avais tellement rien à foutre. Pourquoi te demandes-tu ? Serais-je un enfoiré d'anti-conformiste de mes fesses ? Absolument pas. Ce qui m'a dégouté de consommer ce produit c'est euh... le senscritique ?



"Un film qui prend pour thématique de fond les dérives de la société de consommation et qui émoustille la société de consommation : Le GTA cinématographique quoi !"



George Miller en est rendu là. A 70 ans, il ne fait plus de films subversifs, il fait des films ultra codifiés que tout le monde veut voir avant tout le monde. Dans le jeu vidéo, on appelle ça l'E3. J'ai même vu mon estimé camarade Floax dire publiquement "J'étais tellement hypé par Fury Road que je me suis senti obligé de voir Mad Max 2 !". Mad Max Fury Road, c'est un peu comme "La Bande à Renaud" : une pub pour motiver les retardataires à découvrir l'original !



Chez nous y a pas d'sécu, rien qu'on nous persécute, mais tu vas perdre face à Belzebuth. [...] Que faire du bitume ? C'est voir des frères qui s'entubent ou qui s'entretuent.



MacTyer - 93 HardCore




Exposition



Mad Max Fury Road, c'est quand même sacrément bien fichu (8/10 inside) cinématographiquement parlant. Un concept simpliste, un univers grand-
guignolesque, et une car chase de 2 heures. C'est GTA2 dans l'esprit. Et si toi qui me lis ne connait pas le jeu vidéo, sache que GTA, c'est la référence de la critique professionnelle (l'équivalent des 6 Oscars...). Le script de Mad Max Fury Road a été pensée à l'aide de l'outil open source "Bibisco". Ca coûte 0 francs, ça pèse 150 MO, et ça apprend aux jeunes écrivains en herbe les basiques de la narration.


Par exemple, dans Bibisco, on vous apprend la différence entre un personnage secondaire, et un personnage principal. Un personnage principal, c'est un personnage qui a un conflit à résoudre, alors qu'un personnage secondaire, c'est celui qui n'en a pas et qui ne dispose que d'une fonction au sein du script pour permettre aux personnages principaux de résoudre leurs conflits (de façon direct ou indirect). Alors George, et ses potes, ont remplis les cases de Bibisco.


Max / Conflit : il a tout perdu et n'a plus confiance en l'humanité.
Max / Résolution : Max retrouve la foi en ralliant des hors-la-loi menés par Furiosa pour niquer les méchants, et sauver la citée.


Voilà, et tout le film est à peu près comme ça. On appelle ça, soit de l'art, soit du bats-les-couillisme. Le beat em up de 1989 Final Fight dispose d'un "Bibisco" nettement mieux fichu.


Haggar / Conflit : On a kidnappé sa fille boobisée Jessica.
Haggar / Résolution : Il défonce tous les gangsters avec ses potes hors-la-loi et récupère sa fille, et rend sa ville heureuse.


Ah bah non, Mad Max Fury Road, c'est un Remake de Final Fight en fait ! ^^



Tout l'monde veut s'allumer, tout l'monde veut se la mettre
C'est la fin des haricots, y'a plus d'lovés.
93 Hardcore ! Levez les bras si vous êtes forts.




Level Design



Mad Max Fury Road reprend la structure de level design de Devil May Cry 4. Si vous ne connaissez pas ce monument du jeu vidéo d'action, alors je vous résume le fond de son concept définissant son caractère révolutionnaire.



Le héros va du point A au point B en tabassant tout ce qui se positionne sur sa trajectoire,et une fois au point B, il rebrousse chemin à l'aide de nouveaux movesets pour défoncer tout ce qu'il aurait oublié à l'allée.



Itsuno, DMC4 design, 2008



George Miller sait faire la différence entre un vieux jeu vidéo d'action (Final Fight: point A => carnage => point B/Fin) et un jeu vidéo d'action moderne révolutionnaire (DMC4: point A => carnage = > point B/new heroes come in => carnage => point A/Fin).


Et vous serez très surpris d'apprendre que DMC4 est boudé par nombre de critiques qui n'ont pas votre oeil subtil, camarades de la critique cinématographique ! Les 6 Oscars lui sont passés sous le nez ! Tout le monde dit que "ça casse le sens de la progression". Déprimant n'est-ce pas ? Vous avez bien vu dans Fury Road que ce principe permet à l'auteur de rajouter une dimension politique de fond :



"Pourquoi fuir le système quand on peut se l'accaparer ?"



[Insert any dictator here]




World Building



George Miller privilégie l'action, il ne prend que très peu de temps pour poser son univers, et il a raison : Final Fight rules since 1989 (conféré top beat em all SensCritique). Fury Road ne tombe pas dans les travers des Gears of Wars 2 (2008) et autre Bayonetta (2009). Non George Miller a bien compris le concept d'oeuvre de pure action. Dans la cutscene d'intro de Mad Max Fury Road, George nous explique que le monde a crashé à cause du manque pétrole, ce qui permet de justifier toute la séquence d'action pure qui vont constituer les 2 heures de son film :



"Le monde n'a plus de pétrole : donc tout le monde peut rouler avec des caisses de bâtards".



C'est un basique de world building du XXIth siècle. Tu dis un truc qui sert à rien au tout début (juste pour franchiser ton oeuvre), et puis tu fais tout son contraire pendant ton récit . C'est tellement old skool ces oeuvres qui cherchent à donner du sens à leur action. Par exemple, prenez The Raid (2012). Dans sa cutscene d'intro, on vous montre un gars (Rama) qui passe sa vie à cogner des sac de frappes quand il n'est pas au travail. Cette technique permet à l'auteur de justifier les 1h20 de "patates dans ta gueule" qui vont suivre. Seulement ce procédé est ancré dans les codes passéistes et/ou rétrogrades du cinéma muet. Miller, c'est moderne, c'est 6 Oscars ! C'est :



"Le monde n'a plus de problème de cosmétique, donc les meufs de Victoria Secret et YouPorn peuvent rester aussi bien coiffées et boobisées que dans les films de Michael Bay ou DMC4 ou Final Fight" (dont Fury Road s'inspire largement).



Mad Max Fury Road, c'est George Miller qui prend le temps de t'expliquer que l'eau est rare, pour justifier le fait que sa compréhension de l'économie est aussi avancée que celle de Marine LePen. "Sortons de l'euro, ainsi nous pourrons régner économiquement sur le monde !". "Gaspillons l'eau, ainsi nous pourrons intimider les mecs d'en face du moulin à balles !" C'est-y pas beau le post-nuke à l'arrache ?



Avoir fait de belles études, ça vaut mieux qu'une grosse peine sais-tu.



MacTyer, 93 Hardcore



D'ailleurs, les meufs de Victoria Secret, elles sont totalement en mode "Car Wash" ! Et pourquoi donc dans un monde dominé par l'or bleu ? En tout premier lieu, parce que c'est subversif, comme DMC4 et Final Fight (des oeuvres incomprises qui mériteraient 6 Oscars du jeu vidéo), mais surtout parce que ça créé de la tension :



"Hum Max pas baisé depuis longtemps...
Hum Max pas bu depuis longtemps,
Hum dilemme cornélien...."



Bibisco, l'art du setting narratif 1.0.1 "tension => résolution".



Département du bon-char, on veut s'en mettre plein les fouilles, mais petit, j'te l'ai dit 100 fois : personne n'est sans faille.
Lucifer t'es trop bonne, vient qu'on s'envoie en l'air, infidèle madame misère est bien trop frêle, et beaucoup trop laide.



MacTyer - 93 HardCore




Battle Design



Là où George Miller arrête sa dissonance ludo-narrative (son bats-les-couillisme, si tu trouves le terme technique pompeux), c'est la où Itsuno (DMC series) et Itagaki (Ninja Gaiden 3D series) règnent en maître. Le sens du rythme dans l'action, le renouvellement de types d'ennemis et de combats. Miller est assez peu créatif d'un point de vue tactique, mais il n'a pas la culture vidéoludique pour penser des Intelligences Artificielles modernes. Il en est encore au stade de GTAV (les "dieux du vent" en VF, les "kamikazes" en VO). Le battle design de Miller est hautement qualitatif pour du cinéma (il surclasse Transformers 2 par exemple), mais reste très weak comparé à Dredd (2012) ou The Raid (2012) ou Predator (1987) ou Assault on Precinct 13 (1978) qui disposaient d'I.A. un peu moins "neuneu". Le medium cinématographique est limité et George Miller aussi; je ne lui en veut pas, il a 70 ans.



L'Illusioniste



Néanmoins, Miller réalise de main de maître, une énorme arnaque moderne : la narration par le mouvement, en choisissant de remplacer les dialogues, par des plans sur les visages ou sur l'action, le tout superbement filmé, monté et édité (d'où les 6 Oscars, d'où mon 8/10). George n'a rien pour cacher la bêtise insultante de sa scène d'exposition, et pourtant, il arrive à nous la faire oublier... Tel un gamin espiègle divertissant un chaton en maniant habilement (8/10) une médaille scintillante au gré des rayons du soleil, telle une femme séduisante à moitié nue nous faisant une danse lascive méga bandante (8/10) pendant qu'elle nous subtilise notre porte-monnaie. Depuis le premier vrombissement de moteur de Furiosa, jusqu'au dernier rush sur la citadelle, Miller arrive à nous faire oublier :



  • L'incohérence profonde de son setting narratif.

  • Sa satire à balles-deux du capitalisme (GTA style).

  • Son mouvement féministe sponsorisé par Victoria Secret.


Il paraît que Charlize Theron est l'égérie de Dior, hence, le mec fait pas les choses à moitié... Arnaque du siècle, disais-je donc.



Conclusion



Mad Max Fury Road emprunte au grand jeu vidéo d'action (aussi incompris soit-il) et au grand cirque de spectacle par son minimalisme extrême (8/10), mais market son tout de la manière la plus déplorable possible tel un produit McFestin/AquaCola (GTA/10). Et je pense que George a réussi son coup. Après Predators (2010) RoboCop (2014), voici Mad Max (2015). Welcome in the XXIth century. Longue Vie au Chrome.



[Couplet 1 : Mac Tyer]
Dans mon 93, gros, on est trop dans les dièses
Quand on baise c'est des putes à cent feuilles, pas nos cinq doigts
Département du bon-char, nous on veut s'en mettre plein les fouilles
Mais petit j'te l'ai dit cent fois : personne n'est sans faille
Lucifer t'es trop bonne, viens qu'on s'envoie en l'air
Infidèle, madame misère est bien trop frêle et beaucoup trop laide
Faut qu'on s'entraide, faut du profit
Frelot pour qu'on reste au beau fixe, faudrait moins d'flingues et plus de fric
Carcéral vécu, chez nous y'a pas d'sécu, rien qu'on nous persécute
Mais tu vas perdre face à Belzébuth
Si t'as fait de belles études, c'est mieux qu'une grosse peine, sais-tu
Que faire du bitume ? C'est voir des frères qui s'entubent ou qui s’entre-tuent.



MacTyer - 93 HardCore


StandingFierce
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le 5 sept. 2017

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