Disons-le tout de suite, regarder Manchester by the sea est une souffrance... mais si toutes les souffrances étaient aussi belles, alors je deviendrais masochiste sans aucune hésitation. Le film de Kenneth Lonergan est un véritable chef d'œuvre.


Casey Affleck, formidable interprète de Lee Chandler, livre ici la meilleure performance de sa carrière. Lee, homme à tout faire bourru et asocial installé à Boston, retourne dans sa ville natale à la mort de son frère. Ce qui semble être le sujet principal du film est en fait un prétexte astucieux pour rentrer dans la psyché du personnage par le biais de flashback savamment distillés.
Le deuil est bien présent dans la vie de Lee, mais pas celui de son frère. L événement qui le caractérise est bien plus ancien et bien plus traumatisant. Il n'en parle jamais, d'ailleurs il ne parle quasiment de rien pendant le film ( je n avais pas vu une interprétation aussi silencieuse depuis celle de Ryan Gosling dans Drive ). Ces silences, ces non-dits sont plus bouleversants que des paroles. Le mutisme et l'isolement sont les châtiments qu'il s'impose. Casey Affleck, si sobre dans sa détresse, livre ici plus d'émotions que son frère Ben dans toute sa carrière.


Lee, empli de gravité, est incapable de légèreté comme en atteste la très amusante scène de "rencard" avec une mère célibataire. C'est là un des nombreux tours de force de ce film. Malgré la gravité du sujet, la mise en scène est drôle, allégeant par la même le récit.


Et comment parler de ce film sans évoquer Manchester, cette petite ville du Massachusetts où se déroule l'action. Manchester est une ville ancrée dans le réel. Les maisons et ses habitants sont vrais, loin des clichés hollywoodiens. Manchester by the sea est un film vrai, les actes ont des conséquences et laissent des séquelles.
Lee, dès son retour, ne pense qu'à quitter cet endroit qui ne peut que le mettre en face de son drame personnel. Il tente d'échapper à cette confrontation mais celle-ci finit quand même par arriver quand Lee rencontre son ex-femme Randi dans la rue. En quelques minutes à l'écran, Michelle Williams, qui livre une des interprétations les plus bouleversantes de ces dernières années, ouvre une faille que le personnage de Casey tentait de masquer depuis le début. Si les flashback justifiaient la personnalité de Lee, c est bien dans cette scène du présent qu'il nous livre ce qu'il ressent vraiment. Cette blessure irréparable, ce vide qu'il ne peut combler. Lee est condamné à vivre avec ses remords, comme tout cinéphile qui se respecte devrait être condamné à voir ce film, encore et encore.

Dimix17
9
Écrit par

Créée

le 24 janv. 2017

Critique lue 336 fois

1 j'aime

Dimix17

Écrit par

Critique lue 336 fois

1

D'autres avis sur Manchester by the Sea

Manchester by the Sea
easy2fly
9

Dans les cendres d'un douloureux passé

Manchester by the Sea est typiquement le genre de film dont je ne veux pas qu'il se finisse. Je n'ai pas envie de lâcher les personnages, je veux savoir ce qu'ils vont devenir, quel sera leur avenir...

le 16 déc. 2016

72 j'aime

2

Manchester by the Sea
xlr8
10

Because I can't...

Bon ben pour moi, à ce jour, c'est le meilleur film de l'année, on touche au sublime... Tout m'a plu, l'histoire, la mise en scène, le jeu de Casey Affleck, Michelle Williams (que l'on voit très...

Par

le 19 oct. 2016

70 j'aime

9

Manchester by the Sea
mymp
8

Réparer le vivant

Lee est un survivant, Lee est un fantôme. Plus l’humeur, plus d’avenir, plus d’envies, sinon celle de se foutre en l’air et des bastons dans des bars pour ressentir encore quelque chose ; un poing...

Par

le 19 déc. 2016

58 j'aime

4