Anders Thomas Jensen, le papa de ce Men and Chicken, est aussi celui des Bouchers Verts et d’Adam’s Apple. Sachant cela, difficile d’imaginer que le petit dernier puisse être ennuyeux.
De fait, Men and Chiken, à l’instar de ses frères, nous transporte dans un microcosme déjanté et ne fait pas tache dans la filmographie du réalisateur.


Avec cette fratrie totalement délirante, le réalisateur nous offre un film plein d’un humour noir et cynique qui à fait son succès par le passé. Et comme pour Addam’s Apple, il nous offre une explication à toutes ces bizarreries totalement déjantée, du genre qui nous fait nous pincer pour être certain qu’il ne s’agit pas là d’un rêve, d’un cauchemar, ou d’une hallucination. Et j’avoue être assez friande de ce genre de surprise.
Dans ce petit monde plein d’égoïsme et de violence, la fratrie survit tant bien que mal, loin de la société moderne, avec ses règles absurdes et parfois injustes, sa culture de l’ignorance, sa peur du monde extérieur et ses invraisemblances. Comment ? Parce que malgré tout, il règne une certaine cohésion dans le groupe. Ce n’est pas tant le fait que le maire refuse de dégager la famille de son île pour les placer dans une structure psychiatrique quelconque (ce qui rayerait la ville de 42 habitants de la carte), que l’instinct de famille qui pousse ces créatures étranges à poursuivre sur existence ensemble. Ces frères, adultes, pourraient aisément s’envoler vers des cieux plus propices ou s’entre-tuer (ce qu’ils ne sont d’ailleurs pas loin de faire parfois). Mais ayant été des enfants abandonnés à la souffrance et à la violence d’un père désaxé, ils sont devenu une troupe d’enfant perdus ayant trouvé leur compte dans cette île et dans leur habitudes. Et même les nouveaux venus, élevés par des parents adoptifs, loin de ce monde surréaliste, finissent par réaliser qu’ils ne sont pas si différents.
Une histoire délirante certes, mais qui n’en est pas moins un peu touchante -même si l’on ne sombre pas dans le pathos et que l’humour prend la place du pathétique.


Du côté des acteurs, pas de grande surprise. Le réalisateur retrouve les acteurs avec qui il a déjà tourné et l’équipe fonctionne merveilleusement bien.
Je commencerai par Mads Mikkelsen dont je suis fan. Oui, c’est pour lui que j’ai attendu des mois et des mois et que j’ai acheté le DVD. Parce que j’étais tombé sous son charme dans Adam’s Apple et qu’il avait finit de me séduire dans Hannibal. Difficile ici de le reconnaître ou de lui trouver un quelconque charme. Et pourtant, il est brillant. Preuve s’il en fallait une de son talent. Obsédé par le sexe et la violence, lâche, il nous interprétée un Elias simple(t) qui réagit à l’émotion et se fond dans cette famille déjanté avec brio. On est bien loin de son rôle d’Hannibal !
David Dencik lui, est le petit nouveau de la bande. La conscience du groupe, le moins cinglé de la bande. Son étonnement et son effarement face à la réalité qu’il contemple aide le spectateur à rentrer dans le film en servant de médiateur. Et sa ténacité évidemment est le moteur qui permet au film d’avancer, puisqu’il est le seul pour qui la vérité compte un tant soit peu…
Nicolas Bro, plus effacé, surprend dans le rôle plus intelligent qu’il n’y paraît. Chargé de la lecteur du soir et de son interprétation, l’intelligence du personnage contraste admirablement bien avec son côté brute peu dégourdie. Il n’est certes pas celui qui sort le plus du lot, mais il est assurément très bon.
Nikolaj Lie Kaas quant à lui, voit sa cote remonter dans mon estime. Très sympas dans les deux premiers volets des enquêtes du département V, je commençais à me demander s’il était si bon que cela en regardant le troisième opus. Je peinais à savoir si c’était son personnage qui commençait à m’ennuyer (avec son côté morose et dépressif) ou l’acteur. Et Child 44 ne m’avait pas vraiment convaincu alors… Ici, il nous interprète Gregor, le plus plus soumis des frères et pourtant le plus curieux des trois pensionnaires de la maison. Craintif, véritable enfant battu, il essaye néanmoins de s’ouvrir à l’extérieur et de voir plus loin que ses poules. Certes, le personnage a beaucoup de boulot pour devenir un être humain normal, mais il n’en est pas moins le plus touchant.
Soren Malling, autre petit nouveau, n’est pas en reste. figure paternelle instaurant les règles et les punitions au sein du groupe, il est l’autorité dans le clan. La figure à défier ou devant laquelle se soumettre. détenteur du secret familliale, il est aussi empli de crainte à l’idée de voir les choses changer qu’enclin à frapper tout ce qui le contrarie.


Mauvaise foi, violence, absurdité, voilà de quoi sont fait les personnages de cette famille de cinglés. Une famille que l’on découvre avec étonnement et que l’on apprend à connaître avec toujours plus de stupeur.


Un film surréaliste et horriblement surprenant qui tient son spectateur en haleine malgré un rythme assez aléatoire. Heureusement pour lui, dès que l’on sent une petite longueur sur la deuxième partie du film, celui ci nous offre un rebondissement effroyable qui devrait ravir le spectateur.
Un film qui n’est pas pour le tout venant mais qui devrait plaire aux fan du réalisateur dont la touche perso est indéniable et dont l’histoire, originale, met en scène de très bons acteurs. Une réussite malgré quelques longueurs minimes.

Créée

le 5 déc. 2016

Critique lue 242 fois

Gaby Aisthé

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