J'ai lu la courte histoire de H. Von Kleist avant de voir le film : je l'ai trouvé très intéressante mais on ne peut pas dire qu'elle m'ait marqué (certainement parce que la forme a pris un petit coup de vieux). Mais la transposition sur grand écran d'Arnaud des Pallières m'a vraiment bluffé : il donne une seconde vie à cette histoire, la transcende en remettant brillamment en exergue toutes les questions morales du livre.
C'est sûr, ce type de cinéma est exigeant : le rythme, ou la sobriété des costumes laissera pas mal de monde sur le carreau. Mais ce dépouillement permet à Arnaud des Pallières d'aller au plus profond de son sujet. Par exemple, quand il choisit de ne pas filmer les scènes d'actions de manière spectaculaire, le réalisateur rend leur violence encore plus impressionnante : l'attaque du château est vraiment angoissante car elle est sans fard, brutale. Ça fait froid dans le dos.
Mais n'allez pas croire que la radicalité du film est un cache-misère d'auteur pour combler une quelconque pauvreté graphique. C'est tout le contraire, Michael Kolhaas est vraie baffe visuelle : la beauté des plans tournés dans les Cévennes justifie à elle seule de regarder le film. Et là encore, cette esthétique n'est pas gratuite, car la nature et la lumière nous racontent mieux que des mots qui est Michael Kolhaas.
Et puis il y a Mads Mikkelsen : c'est impossible d'imaginer quelqu'un d'autre à sa place une fois que l'on a vu le film ! Sa prestation balaie toutes les réserves que je pouvais avoir sur le film. La dernière scène voit la caméra, braquée au plus près de son visage, capter en quelques minutes, toutes les émotions d'un homme qui a choisit sa condamnation : c'est bouleversant. C'est juste la meilleure scène de Cinéma que j'ai vue depuis des lustres. Et le film mérite un 9 juste pour ça.