Minuit à Paris fait l’apologie d’un temps où les artistes avaient la main mise sur la ville artistique par prédilection, lieu de rencontre de tous les esthètes. Les arts, littérature, peinture, photographie, musique, danse et cinéma, se mélangent alors pour tenter d’atteindre un idéal : la vie rêvée, illusoire. Midnight in Paris est en bref un hommage du 7eme art à tous les autres.
Comme le montre la référence proustienne à la recherche au temps perdu, ce film se veut être un hommage à la littérature française. Woody Allen se transforme en Balzac et dépeint les mœurs de tout Paris à plusieurs époques différentes. On peut également voir dans le personnage de Gil, l’albatros de Charles Baudelaire, un poète incompris qui tente de fuir son réel pour se perdre dans ses pensées. Et finalement on se demande si Gil n’est pas une énième représentation de Woody Allen lui-même, comme il en a l’habitude de faire.
Dans Minuit à Paris c’est finalement une énième déclaration explicite de Woody Allen : il a peur de vieillir, de mourir et le temps qui passe l’angoisse tellement que depuis plusieurs années on ne voit plus son visage ridé à l’écran, et qu’il préfère ici laisser la place au vivifiant quarantenaire Owen Wilson. L’art est au centre de ce film et Woody lui fait la part belle. Ici, l’art traverse le temps, joue avec le temps et le manipule. Finalement, c’est ce qui rend le cinéaste immortel et invincible. Et finalement sa machine à remonter le temps est ce film, qui le transporte en plein âge d’or. Rien ne résiste au pouvoir créatif de l’artiste, qui enchante son monde. Il peut redevenir jeune, il peut vivre à l’époque qui l’inspire, et réciproquement inspirer la société.
Pourtant, cette société tant désirée, pleine de créativité, et de beauté ancienne n’est que mirage et leurre. Elle masque le vide de l’existence et ne peut combler les peurs et les besoins de l’âme. Les siècles se suivent, mais les problèmes humains demeurent les mêmes. Woody Allen accepte cette terrible frustration avec résignation. Il demeure encore un insatisfait. Un insatisfait terriblement attachant et amusant, qui nous entraîne avec toujours autant de grâce et d’humanisme dans son univers névrosé.
Finalement, l'artiste ne peut vivre et créer qu'en étant meurtri et blessé. C'est le message que Woody Allen, sous les traits d’Owen Wilson, semble nous faire parvenir. En éternel insatisfait, il ne trouve satisfaction ni auprès de sa ville, ni auprès de son temps. Il est condamné à errer en faisant de son insatisfaction, sa frustration et son mal être ses sources d'inspiration.