Il y a dans ce film une fracture sociale...
D'abord celle, patente, entre Gil et sa fiancée Inez. Lui est auteur, romantique, et bohème, elle est fille à papa, républicaine tendance Tea Party et inconditionnelle des plages de Malibu.
Mais elle cache une autre fracture, celle que "Minuit à Paris" crée dans le public.
D'un côté, il y a ceux qui auront reconnu la facade du Bristol au premier coup d'oeil, qui auront goûté les perspectives du quartier latin, et qui frémiront à la vue de chaque recoin de Paris qui leur est cher.
Si vous n'avez jamais habité sur la rive gauche, que vous ne faites pas la différence entre la rue Mouffetard et le périphérique, ce n'est pas de votre faute. Mais vous êtes de l'autre camp.
Et ce sera la même chose à chaque rencontre que Gil va faire tout au long du film. Il y a ceux qui vont frémir à la prononciation du nom d'Hemingway, reconnaître le pianiste en fond de salle et sautiller sur leur siège dans chaque nouveau bistrot visité. Ceux là ont lu "Alabama Song" et savent qui fût Zelda Fitzgerald. Les autres vont sans doute trouver comique cette évocation du Paris des années 20, mais auront bien du mal à suivre cette génération perdue jusqu'au bout de la nuit...
Alors ?
Alors, qui que vous soyez, allez donc voir ce film dans une salle parisienne, à la dernière séance, avec celle que vous aimez.
Quand vous sortirez tous les deux dans la nuit, sans réfléchir, hélez donc un taxi, jetez-vous dedans, filez dans un bar du cinquième et partez à la recherche de l'âge d'or.