Brian je t'aime.

Je t'aime tellement qu'à la manière d'un couple j'ai appris à vivre avec tout tes défauts, ton outrance naturelle qui te fait basculer du côté obscur du téléfilm, ton obsession à esthétiser chaque scène même quand ce n'est pas forcément idoine.
Quoi que tu fasse, tu ne sais te brider, ta personnalité transpire chacune des secondes de ton cinéma à travers tes grosses ficelles de réalisation, comme une pulsion incontrôlable. C'est tout le paradoxe de ton oeuvre qui se veut maîtrisée mais qui émane une étouffante forme d'humanité.

Toi tu es un maniériste incarné, cette caste de cinéastes défaitistes qui pensent que tout a été fait et que nous n'avons plus vocation à créer du neuf mais a seulement reproduire les éternels schémas du passé. Ainsi tu as passé une longue partie de ta carrière retravailler l'oeuvre de Hitchcock, parfois en prolongeant sa volonté mais aussi d'autres fois en la cognant sec.
Certes ton cinéma est souvent maladroit, parfois risible, touchant pour les convaincus et exaspérant pour les autres mais il a un fort caractère.
Cette scission du public apparaît évidente, elle est ton triste destin mon ami Brian.

Alors forcément en tant qu'adepte, je me sens un peu vexé quand certains regardent de travers tes films considérés comme les moins sexy .
Car si il y'a bien une oeuvre de Brian qui est sous-estimée c'est celle-ci, et fichtre dieu que c'est injuste. Mission Impossible est un des films les plus inventifs et permissifs avec les canons Hollywoodiens que l'on ai pu voir dans les années 90.

Quelque part M.I. est une des productions les plus représentatives du cinéma de De Palma, l'ensemble de ses thèmes phares y sont représentés. Ainsi resurgiront des lieux familiers tels que la scène de la gare maintes et maintes fois traités par le cinéaste, les personnages désincarnés, les notions de perceptions d'une action à travers des outils de capture à la Blow Out...

M.I. est aussi pour le cinéaste un jeu équilibriste entre film de commande par Captain Tom Cruise et l'idée de réaliser une oeuvre d'auteur.

A la fois film grand spectacle rythmé qui rempli sa mission d'imposer des scènes iconiques intrinsèquement virtuoses, et une source de réflexion sur le jeu de manipulation des images.
Le propos du film est amené avec brio de par son schéma narratif introduit par l'intermédiaire d'une mission typique de la série TV qui viendra à capoter pour ensuite faire rentrer ses héros dans un récit aux règles caractéristiques d'une pellicule à la De Palma.

Au sein de cette fiction neuve les protagonistes devront réinventer leurs manières de penser et de procéder pour maîtriser ce nouveau cadre, afin d'en saisir les nouveaux codes.
Pour cela, les figures du films se livrons une guerre de manipulation via la maîtrise des outils de capture technologiques d'images/sons. Pour devenir le chef-d'orchestre de cette nouvelle narration.
Métaphore brillante du rôle et des procédés utilisés par un metteur en scène.

Par la beauté de sa réalisation, par l'ingéniosité de son discours.
Mission Impossible est un de ces plaisirs dont je ne me lasse pas, qu'il m'est possible d'apprécier pour ses qualités de simple blockbuster à suspens mais aussi lors des jours ou mon esprit est en éveil par son plaisir d'intellectualisation. Une des œuvres les plus réussies du cinéaste qui aura apportée une vision singulière du film triple A dans les années 90, un immanquable.