Alan Parker a déclaré après la sortie de Mississippi Burning être rapidement dépassé par ce que le film était devenu, à savoir un objet politique. Rapidement résumé, le film se passe dans le Mississippi des années 60 toujours sous la ségrégation. Suite à la disparition de trois activistes dont un noir, deux agents du FBI sont dépêchés sur place pour régler l’affaire. Ils se confrontent à une police et une population locale très imprégnées par le KKK. L’histoire traite de racisme systémique et d’histoire des États-Unis.
Si on parle du film en lui-même, l’histoire est intéressante et Alan Parker fait un boulot propre et soigné, mais sa réalisation est très factuelle, descriptive. Si le casting est bon, la distribution des rôles s’avère assez binaire, chaque personnage étant enfermé symboliquement dans un rôle bien délimité. Il y a une semi-confrontation entre le jeune loup du FBI Ward, qui garde un côté idéaliste et veut suivre la procédure à la lettre et un vieux loup de mer Anderson, ancien shérif de bourgade, qui connait bien les milieux du sud et qui suit ses propres règles, prêt à se salir les mains. Après une bonne partie du film à essayer vainement de faire parler la population, et à jouer au chat et à la souris avec le KKK, le duo d’enquêteurs va abandonner ses principes et recourir à la violence la plus basique. Ce revirement brusque est montré rapidement, comme avec résignation. Mississippi Burning finit sur un ton amer et assez troublant, préférant « conclure », soit trouver les coupables, en favorisant la violence et la vengeance. L’une des dernières répliques de l’agent Ward, ce « on est peut être tous coupables », souligne autant le rapport au racisme qu’au rapport à la justice aux États-Unis, ramenant ainsi au même plan ceux qui font et ceux qui laissent faire.
Mississippi Burning est plus resté dans l’histoire du cinéma par la controverse qu’il a suscité à sa sortie : c’est un film tiré de faits réels qui veut parler de racisme sans représenter véritablement la communauté qui fait l’objet de cette violence, la reléguant au second plan. Alan Parker souhaitait présenter le point de vue d’un européen sur l’histoire américaine et non pas le point de vue d’un blanc. Sa vision était de s’en tenir aux faits, et on doit mettre à son crédit et à sa légitimité un scénario bien écrit, qui aborde de nombreuses facettes du racisme et de la pauvreté. Mais il a lui-même reconnu qu’il a bénéficié de plus de visibilité et de facilité à faire son, là où peu de réalisateurs noirs arrivent à percer dans le système cinématographique de l’époque. Au final, le film apporte un regard double sur le racisme, par le sujet qu’il traite et par sa simple existence au sein de la production cinématographique. Au delà de la qualité intrinsèque du film, qui « fait le job », ce film fait passer un message imparfait par moments mais qui a mis un débat sur la table. Et qui aura même inspiré des journalistes et enquêteurs et conduit à des condamnations réelles. Que vous l’appréciez ou le rejetiez, c’est un film qui ouvre la discussion et nous fait encore aujourd'hui réfléchir.