Ce qu'il faut avant tout savoir sur Monsters, c'est que sa réalisation a bénéficié d'un budget totalement dérisoire, surtout pour un film de monstres. Gareth Edwards s'est en effet contentait de 200 000 dollars pour mener à bien son projet, soit l'équivalent du budget coiffure d'un tournage d'Emmerich ou de Bay. Mais c'est en véritable roi de la débrouille que le réalisateur va réussir ce pari fou, assurant pour l'occasion, en plus de la réalisation, les décors, la photographie et le scénario de son film. Si le script n'a rien de très développé, il attise suffisamment notre intérêt pour nous convaincre de suivre la route d'un homme et une femme, contraint à traverser la zone infectée pour rejoindre l'Amérique. Une aventure avec une toile de fond post-apocalyptique, dans laquelle vont évoluer deux inconnus que leur sort va finir par lier. Une amourette assez conventionnelle en soi, où chacun découvre peu à peu l'autre, mais qui tient grâce au jeu convaincant de ses interprètes Whitney Able et Scoot McNairy. Jonglant entre science-fiction, road-movie et romance, Gareth Edwards a su inculquer au long-métrage une ambiance singulière, pour un voyage tantôt apaisant, tantôt angoissant. Tout comme nos deux protagonistes, on prend le temps de contempler les décors délabrés, dénués de toute trace de vie humaine. La nature reprend peu à peu ses droits au fil des années, et on vient à penser qu'on est finalement peu de chose. Faut dire que le long-métrage nous laisse le temps de réfléchir, ah ça... C'est d'ailleurs ce que je lui reproche. A force de longues séquences silencieuses qui privilégient l'observation, la réflexion, voire la méditation de ses personnages, le long-métrage devient un tantinet trop contemplatif. Même s'il s'en dégage une certaine douceur poétique et lyrique, le rythme s'en voit affecté, car la qualité de la photographie et des décors ne parvient pas toujours à remplir une impression de vide assez désagréable par instant. Et pourtant, il y a de sacrés bonnes choses dans ce Monsters, un film de monstre avec une approche intimiste et sociale. Avec le temps, les Hommes se sont habitués à la présence de ces étranges créatures qui se sont finalement ancrées dans leur quotidien. Chacun mène sa vie de façon à peu près ordinaire, presque blasés par les évènements. En réalité, plus que les monstres, ce sont les Hommes et leurs bombes toxiques qui sèment la mort dans les populations vivant aux alentours de la zone interdite. Gareth Edwards critique ainsi indirectement les actions militaires des gouvernements d'hier et d'aujourd'hui provoquant des dommages collatéraux subis par les populations civiles. Mais les monstres dans tout ça ? J'en parle finalement peu alors qu'ils sont à l'origine de toute cette pagaille, bien que ce soit l'Homme, et ses penchants à repousser toujours plus les mystères de la nature, qui en est le véritable responsable. Autant prévenir tout de suite ceux qui attendent du sensationnel, des frissons et de l'action: les grosses bébêtes, on les voit peu. Les réalisateurs ne cherche pas à nous en mettre à tout prix plein la vue, et ça fait du bien. Rien n'est explicite, tout est dans la suggestion, et même lorsque les créatures apparaissent à l'écran, on ne parvient pas à analyser distinctement leur apparence. Il faudra pour ça attendre la fin du long-métrage, qui justifiera amplement notre attente. Très beau boulot du côté des effets spéciaux, impressionnants compte tenu du budget. Une conclusion vraiment réussie avec une scène finale surprenante, belle et gracieuse, remettant en cause notre vision du film. Une dernière pirouette scénaristique et le générique de fin tombe, nous laissant pour le coup un peu sur le cul. Voilà un long-métrage indépendant et intelligent, qui prouve qu'avec un mini-budget, beaucoup de débrouillardise et de volonté, il est finalement possible de rivaliser avec la machine Hollywood.
JulieTournier
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le 9 avr. 2013

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Julie Splack

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