Mulan
4.4
Mulan

Film de Niki Caro (2020)

Un navet bien emballé dans de la soie rouge

Le réalisateur était-il le caméraman ?


"Peu importe le film, tant qu'on a des plans magnifiques". Ces mots auraient pu être ceux du réalisateur tant l'intérêt du film réside uniquement dans les fonds d'écrans que l'on peut tirer de chacun des arrêts sur image. Le reste est un triste sacrifice réalisé par Disney sur l'hôtel de l'argent facile... qui a une nouvelle fois poignardé mon enfance en plein cœur.


Car qu'on ne me dise pas que le film est inspiré d'un poème et pas de Mulan 1998. Tout est fait pour jouer la nostalgie, de la musique à la typographie, donc le prétexte "non il ne faut pas comparer ce film à Mulan 1998" ne tient pas. Je vais donc oser la comparaison... et ce film crache littéralement à la figure de mes souvenirs. Le seul déshonneur qu'il jette est sur le chef-d'œuvre de Disney de 1998. Que de personnages superflus et inutiles et de suppressions incompréhensibles :


Mulan : Au début du film, on sent le traquenard : c'est déjà une Ninja dans l'âme... quel intérêt de l'entrainer plus tard, si déjà, à 6 ans, elle grimpe aux maisons et sait manier les armes ? Les plans à rallonge sur son visage la font malheureusement passer pour une potiche, loin, bien loin de la guerrière qui s'est développée à force d'entrainement dans Mulan 1998. Ici, vous trouverez une Mulan "magique", qui est de base plus forte que tout le monde grâce à son CHI ! Oui, vous avez bien lu, on est dans Dragon Ball. Vous pourriez presque entendre le réalisateur : "Oh ça va hein ! C'est un film asiatique, donc c'est comme vos conneries de Mangas là, vous êtes pas contents ?? ". Mulan ne devient pas plus forte, plus courageuse grâce à son entrainement, elle est de base magique, ce qui détruit le message féministe fort de Mulan 1998. Ne vous attendez pas à la voir faire autre chose que des regards neutres sur des plans en effet Bokeh. Vous ne la verrez pas se couper les cheveux pour prendre la place de son père, vous ne la verrez pas monter au poteau pou arracher une flèche à la sueur de son front, vous ne la verrez pas tomber amoureuse du général, vous ne la verrez pas blessée, vous ne la verrez pas rire et à peine sourire... bref, vous ne la verrez tout simplement pas : parce que Mulan 2020 est invisible. Ce n'est pas un film, c'est une séance de mannequinat. Aucune émotion, aucun humour, tout est comme lyophilisé, gommé, parfait. Et quelle blague à la fin lorsqu'elle part avec le détachement pour sauver l'empereur... mais qu'elle rentre exactement dans la pièce où tous les autres gardes se font enfermer ?? ça rajoute 6 personnes à la 100ène qui pouvait se débrouiller sans elle...! Magnifique shoot digne de Olive & Tom à la fin. Je ne sais pas pourquoi, mais elle va passer le film à shooter dans des accessoires comme si c'était des ballons de foot. Mais vous entendez déjà presque le réalisateur : "Oh ça va hein ! C'est un film asiatique, c'est comme Dungeon et Dragon et vos saloperies de Manga là, z'êtes pas contents ?". Elle enlève aussi son armure en pleine bataille, rien que pour le style.


La sorcière : son histoire est aussi facile à résumer qu'inutile : elle n'est pas acceptée parce qu'elle est différente... (??) et soutient le méchant pour qu'elle puisse pas être rejetée quand il sera au pouvoir. Son côté magique où elle peut se transformer à loisirs en 1 aigle ou en... 1000 chauve-souris (??) ajoute un côté WTF au film. Pourquoi ce personnage ? Imaginez le film sans elle, ça ne changerait pratiquement rien. Mulan n'aurait qu'à utiliser son Chi à la fin pour géolocaliser l'empereur ligoté en haut d'une zone industrielle... au point où on en est, ça passerait.


Le Phoenix : magnifiques couleurs. De jolies plans sur la fin lorsqu'il passe derrière Mulan. Voilà. Sinon il a un petit côté cerf-volant qui ravira les amateurs de jeux de plein-air. C'est lui qui a probablement ravi la place de Mushu, comme guide spirituel. Rappelons que ce petit dragon en 1998 qui suivait Mulan animait à lui seul une grande partie du film, donnait la réplique à Mulan et... sauvait la Chine (c'est lui qui tirait tout de même le projectile final pour liquider le méchant). Le remplacer par cet ébauche de "Phoenix", qui ne parle pas et ne sert strictement à rien est une volonté affichée d'envoyer ce film au panthéon des plus gros navets de Disney.


Le méchant : ah ça, c'est le méchant. Il a une tête de méchant et ses copains sont habillés en noir. Il se bat à la fin avec de la lave en-dessous, comme Bowser avec Mario. Il arrête les flèches à la main aussi... ce qui mène à une scène des plus burlesques à la fin. Dans Mulan 1998, il était effrayant, précisément parce qu'il était impitoyable et opportuniste. Ici, c'est un lâche qui tente d'assassiner l'empereur. Il mène une charge au milieu du film puis, juste avant que les flèches n'arrive sur lui, bifurque avec ses gars sur la gauche et esquive les flèches... une action risquée qu'il aurait pu ingénieusement éviter en... ne chargeant pas à la tête d'une armée qu'il va quitter quelques secondes après le début de la charge...


Le criquet : charmant petit porte-bonheur en 1998, personnage immortel simplet et humain en 2020. Immortel, parce qu'il semble se prendre 6 flèches à la fin et se relève avec un magnifique sourire... comme chacun de ses 6 compagnons, pourtant tous pris au piège dans un corridor, en prise avec des guerriers du désert rompus au combat. Soyez tranquille, aucune égratignure pour les gentils.


Le film m'a laissé l'impression d'avoir été monté, écrit et développé par les monteurs, cadreurs et ingénieurs du son... un peu comme si le film était au service des plans. Chaque scène donne l'impression d'une symétrie : le même nombre de lampions à gauche comme à droite, le même nombre de piliers à gauche et à droite, ... Tout est toujours parfait, aligné, et... c'est dérangeant. L'ensemble laisse une impression de film de série B, on sent bien que les décors... sont des décors.


Je pense qu'il est inutile de continuer à tirer sur l'ambulance. Ce remake ne m'a pas touché, ni par ses personnages, ni par ses musiques, ni par ses dialogues, ni par son fan-service, ni par son histoire. Même si je reconnais volontiers la beauté de la lumière, des effets visuels et le cadrage, (d'où 2 étoiles au lieu d'1), cela n'en fait pas un véritable film pour autant. Le Teaser était génial et la scène des crédits avec une outro à la James Bond est superbe. Banco ! Les gens pensent avant d'aller le voir, en combinant les images du Teaser à leurs souvenirs, que ce sera formidable... alors qu'au final, c'est une immondice enveloppé dans de la soie rouge.


Disney a bien fait de ne pas le diffuser au cinéma, car en plus d'avoir gagné 20€ par adhérent sur Disney+ et d'avoir esquivé l'impact du confinement, il a aussi évité les émeutes d'une génération qui n'aurait pas supporté de voir un massacre digne de l'affront qu'était Dragon Ball Evolution. Introduire un peu d'humour, donner une âme à Mulan, à ses compagnons d'armes, garder le message féministe, ... bref, garder ce qui avait fait le succès de Mulan 1998 en introduisant un univers assumé comme plus sombre... autant de points qu'il aurait été facile de mettre en œuvre, étant donné le budget du film (+ 200 Millions de $)...

Mac-Murray
2
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le 26 oct. 2020

Critique lue 113 fois

Mac-Murray

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