Donner son coeur à quelqu'un peut vous coûter la vie....

Never let me go est un film de science fiction qui réussit l'exploit de nous faire oublier ce qui est réel ou pas.
L'astuce est de recréer le monde tel qu'on le connait en ajoutant un zeste d'avancée scientifique, trois fois rien qui suffisent amplement à créer une situation inédite (et qui on l'espère restera à l'état de fiction).
L'histoire devient vite crédible, surtout parce qu'on ne nous livre pas l'information en bloc mais par petites touches, des allusions, des minis révélations: pas de révélation fulgurante mais une atmosphère qui perdure.

On découvre nos trois protagonistes (une blonde niaise, une garce brune, et un petit garçon paumé) dans un internat anglais "typique", avec des uniformes, des enseignantes austères, et une vie millimétrée. Les enfants sont dociles, leurs chamailleries et rapprochements semblent classiques, une vie normale en somme. Et puis grâce à l'arrivée d'une nouvelle surveillante, on comprend que tout n'est pas si normal, que les enfants bénéficient d'un suivi médical hyper poussé, et petit à petit on découvre qu'ils sont tous des clones destinés à fournir des organes, de fait leur espérance de vie est très courte.

Quand cette révélation est faite aux enfants, on imagine qu'ils vont tenter de s'échapper, de remédier à leur situation, mais non, le néant, on passe sous silence les doutes éventuels des "cobayes".

Je ne vais pas raconter toute la suite du film, mais c'est ce manque de réaction qui perd le plus les humains que nous sommes: on ne peut pas appréhender les réactions de personnes ayant subit un tel conditionnement. Le pire pour moi est de savoir qu'il y a des clones volontaires pour "accompagner" les autres dans leur mort, juste pour grappiller quelques années.... J'ai l'impression que c'est se faire souffrir quelques années de plus surtout.

La beauté de ce film ça n'est pas l'histoire d'amour très classique et courue d'avance (d'ailleurs on nous le montre d'entrée de jeu, comme pour nous signaler que ce n'est pas là qu'on va être surpris), c'est plus le traitement de ces humains "créés" pour en sauver d'autres et à qui on donne une semi liberté, comme si on leur louait leur propre vie, comme s'ils étaient en CDD.

Les années semblent s'écouler pendant une bonne partie du film dans une sorte d'inconscience du résultat, et puis d'un coup quand on retrouve keira Knightley plus maigre et plus fatiguée que jamais, on est rattrapé par la réalité, et ça fait mal, on en a des hauts le cœur quand elle meurt (cette scène mon dieu elle m'a chamboulée!)

On a envie de se révolter pour les survivants, de leur dire de se sauver, ou à défaut, de prendre la voiture et se jeter d'une falaise juste histoire de dire merde à tout le monde. Au lieu de quoi nos petits soldats font ce pour quoi ils sont programmés, en se faisant une raison.

C'est frustrant et logique en même temps, et je pense que c'est sain qu'un tel sujet fasse réagir les gens: tant qu'on arrive à s'émouvoir de ces situations, j'espère qu'on sera à même d'empêcher qu'elles ne se produisent dans la vie réelle.


L'image est très belle, les acteurs beaux et bons, la musique colle parfaitement, une ambiance parfaite pour un film qui m'a fascinée et écœurée.
iori
8
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Créée

le 17 avr. 2012

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iori

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