Super Precog contre les Ennemis Sans Raisons

Film dont je n'avais pas entendu parler avant de tomber dessus hier, Next a le mérite d'être plus ou moins inspiré d'une excellente nouvelle de Philip K.Dick, ce qui est sa principale qualité.


Plus ou plutôt moins car si ce film prétend adapter The Golden Man, en fait il n'a gardé de cette nouvelle que l'histoire d'un precog -homme pouvant voir l'avenir- surveillé par la police, quand elle traite de l'émergence d'une nouvelle race supérieure, n'ayant pas que le pouvoir de précognition, et d'une police chargée d'éviter le triomphe d'un tel mutant. Enfin ce n'est pas la première fois qu'un film prétend adapter Dick en ne retenant qu'une petite idée d'une de ses œuvres, et ça ne donne pas forcement de mauvais films (voir Blade Runner), mais ici c'est assez extrême de mettre "The Golden Man" comme source quand quasiment tout en est évacué.


Ceci étant dit, le traitement consistant à éliminer tout ce qui ferait trop SF pour placer le precog dans un cadre contemporain réaliste (enfin pas moins que le thriller d'espionnage classique), en faisant une sorte de super-héros devant réaliser qu'avec son pouvoir vient des responsabilités (ici aider le FBI à trouver une bombe atomique cachée par des terroristes), est une idée qui dans le principe n'est pas mauvaise.


Hélas, comme on le sait, les films de Nicolas Cage peuvent se diviser en deux catégories : ceux où il rappelle que quand il veut il peut se montrer un grand acteur du niveau d'un Pacino ou De Niro (ex : Birdy, Lord of War, Leaving La Vegas), et ceux qu'il a accepté de tourner pour payer ses arriérés d'impôts mais où il se montre plutôt du niveau d'un Christophe Lambert (ex : la plupart des autres). Et il apparait dès les premières minutes que Next fait partie de cette seconde catégorie. Ce qui est d'autant plus dramatique que toute l'histoire devrait être portée par son personnage, qui ne doit pas disparaitre de l'écran plus de 10 minutes dans tout le film. Et que l'intrigue comprend notamment des scènes d'amour qui nécessiteraient pour y croire que l'intensité de son regard parvienne à dépasser celle d'une épagneul demandant une nouvelle ration de croquettes. Quant au reste du cast, manifestement inspiré par sa performance ou dans la même démarche fiscale (on notera notamment la présence de Peter Falk, jouant aussi brillamment que dans les dernières saisons de Columbo) il est très loin de sauver l'affaire (il faut dire, pas trop aidé par des dialogues particulièrement neuneus, en particulier pour les scènes d'amour sus-citées, pauvre Jessica Biel faut reconnaître qu'il n'y avait pas grand chose pour l'aider).


Mais, une bonne idée de départ étant là, et les scènes pleines d'aller et retour dans le temps (le héros fait ci ou ça, mais ça marche pas, et hop retour à la situation initiale pour qu'il fasse un autre choix) et de moments d'action assez bien tournées ça se laisse tout de même voir. Si ça évoque par moments beaucoup trop Minority Report (la poursuite initiale) ou Un jour sans fin (la séduction par échecs et retours à la scène initiale successifs), c'est assez naturel vu le thème, et comme toutes les œuvres de ce genre assez plaisant à voir, l'effet "est ce que cette fois ça va marcher ?" parvenant à compenser le coté répétitif de cette construction. Ce serait même un bon thriller si on parvenait à accrocher à l'intrigue.


Le problème est qu'à celui des gentils jouant comme des huitres s'ajoute un problème plus scénaristique (ou d'absence scénaristique) au niveau des méchants. A savoir qu'ils sont totalement génériques, des terroristes sans autre but que d'être très méchants,et sans autre idée que faire péter une bombe ou d'enlever la copine du héros parce qu'ils sont très méchants, tout en tuant de manière quasi gratuite quelques personnages secondaires au passage (pour des terroristes ils ne sont pas des masses discrets). Sans même parler du paradoxe* relatif à leurs actions sur lequel se base l'intrigue.


Enfin en conclusion, un film qui part d'une bonne idée, a quelques scènes qui se laissent voir (celles ne réclamant pas trop de jeu d'acteur ou de dialogues), mais qui n'est pas injustement oublié.


*


En effet le precog ne peut voir que 2 minutes à l'avance dans son propre avenir, mais a des visions illimitées dans l'avenir pour ce qui concerne sa copine. Par conséquent, pour qu'il puisse découvrir la bombe il faut que les méchants la kidnappent et l'amènent là où elle va exploser. L'action principale des méchants, qui s'intéressent à la base au héros en apprenant que le FBI s'intéresse à ses pouvoirs, consistant à justement enlever la copine en question pour l'amener dans la ville qu'ils visent, on se dit rapidement qu'ils auraient été plus inspirés de s'épargner cet effort, auquel cas il n'y aurait juste pas de film.


Quant à la fin ouverte du film elle est encore plus paradoxale, le héros décidant après un retour arrière d'aider le FBI mais en évitant de mêler sa copine à l'affaire et donc son kidnapping, ce qui revient pour lui à se priver de l'essentiel de ses pouvoirs, dont celui de re-revenir aussi loin en arrière puisqu'il ne peut plus avoir de toute vision concernant la bombe lui donnant plus de 2 minutes d'avance (bon après vu qu'il garde le souvenir de la première tentative ratée, où il en avait grâce à la présence de sa copine, on peut imaginer que ce n'est plus nécessaire, mais c'est totalement paradoxal, sachant que ça justifierait qu'il ait depuis le début des visions concernant tous les endroits où sa copine aurait pu être dans le futur, dans un avenir n'ayant finalement pas lieu ou un autre).


Enfin cette idée originale des scénaristes (seule chose qu'ils ont ajouté au concept dickien des precogs), du gars capable de voir à une distance x dans l'avenir le concernant, mais y pour l'avenir d'une autre personne, s'avère au finale on ne peut plus foireuse (ou mal utilisée) plus on y pense.

Antonio-Palumbof
5

Créée

le 13 déc. 2017

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