Il existe dans les confins de la psyché humaine une humeur à la parfaite frontière entre l’ennui et la fascination. Une humeur qui nous conduit gentiment en dehors de tout espace temporel, ou 90 minutes peuvent en paraître 180, mais aussi 45. Une humeur qui se caractérise par une lassitude hypnotique qui nous pousse dans une douce indifférence, mais qui nous donne l’irrésistible envie d’en voir et d’en savoir plus. Une humeur qui nous plonge dans une torpeur envoûtante qui engourdi doucement nos sens, mais qui nous laisse les yeux grands ouverts, les oreilles aux aguets.


Pour son premier film, l’australien Ariel Kleiman nous entraîne dans ce recoin retranché de notre esprit, dans cette humeur contradictoire, grâce à une ambiance sombre et pesante, à un rythme lent et contemplatif accompagné d’une narration bien trop floue et prévisible. Dans un monde crépusculaire à moitié en ruine, où des bâtiments en béton décharnés s’élèvent au milieu des falaises rocheuses et de la végétation redevenue sauvage, sous un ciel toujours gris.


Des enfants tueurs, stars de karaoke


Cassel (Gregori), tronche de kosovare et présence quasi-mystique, guru illuminé, dirige une société parallèle où il recueille des jeunes mères et leur nouveau-née, pour les protéger de ce monde extérieur dangereux. Une société où il est le père, l’amant, l’ami, le confident, le professeur, le régisseur, le protecteur. Le dictateur. Une société où il entraine les enfants à tuer pendant qu’il se tape les mamans. Un sage élevage de tueurs à gages. L’utopie malsaine d’un esprit criminel.


C’est à travers les yeux bleus d’Alexandre, 11 ans et premier enfant recueilli, que l’on découvre cette société d’un nouveau genre. Un regard naïf sur un univers violent. Un regard naïf sur l’aliénation et sur l’embrigadement des enfants. L’éducation, l’admiration paternel, les jeux, les moments de détentes, les récompenses, la compétition, tous ce qui constitue la vie d’un enfant est détourné pour mieux servir Gregori, pour les transformer en petits tueurs obéissants. Un regard naïf qui offre quelques très belles scènes, légères et pesantes, glauques et poétiques. Comme cette performance touchante d’Alexandre et d’Ariana au karaoke, maquillage sur visages innocents, lumières discos fluo sur murs en béton écaillés. Un regard naïf qui va commencer à percevoir les contradictions dans le discours de Gregori. Un regard plus si naïf qui va amener Alexandre à voir cette communauté telle qu'elle est.


La narration classiquement prévisible ne passionne malheureusement jamais et choisi la facilité en laissant volontairement de côté des points essentiels. On aurait aimé en connaître plus sur ces mères qui conduisent leurs enfants dans cette étrange communauté. Sur le discours de Gregori pour les faire venir, pour les faire rester, pour leur faire accepter cette vie, pour elles et pour leurs enfants. Pour que l’on puisse comprendre leurs motivations et leurs points de vue. Pour les rendre plus crédibles.


Le choc entre vision enfantine et univers décadents donne toutefois naissance à une atmosphère malsaine captivante, entre conte enfantin lumineux et film noir malsain.


Entre ennuie et fascination.

Clode
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le 13 mai 2015

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