Brian de Palma n'a jamais été un réalisateur très élégant. Ce sont même ses fautes de gout qui lui donnent un style unique. Brian de Palma c'est le réalisateur des néons fluos, des abominations musicales 80's et du granguignol. Mais ce sont ces kitscheries qui font son style. De plus de Palma ce n'est pas que le mauvais goût. C'est aussi (et surtout?) un malade. Un malade d'Hitchcock. Un obsédé capable de consacrer une moitié de sa filmographie à revisiter (parfois plan par plan) le cinéma du grand Hitch. Cela a donné Obsession, Pulsion, Sœurs de Sang et aujourd'hui Passion.
Dans la première moitié du film de Palma met en place les personnages et les éléments clefs du Thriller. La musique (un mix entre le pire de jean Michel jarre et de la musique d'ascenseur) est ignoble mais c'est souvent le cas chez lui; à l'exception de certains miracles comme celle d'obsession (Herrmann évidemment, qui d'autre?). Le film debute très classiquement, les personnages sont bons, les actrices excellentes mais le Thriller ne décolle pas. A ce stade, l'inquiétude monte: est-ce tout ce dont de Palma a dans le ventre?
La réponse est non! De Palma a gardé le meilleur pour la suite. Dans une seconde partie magistrale, De Palma fait décoller le film vers l'onirique, le suspense et revient dans la veine de ses premiers films. Jumelles, meurtre, complot, tous les éléments habituels sont là! Et ça marche encore une fois! Tout y est, même le split screen ici utilisé de manière sublime en mettant en parallèle l'après-midi d'un faune à un meurtre sanglant. C'est grâce à ce genre de séquences que l'on pardonne tout à De Palma (par exemple cette ultime kitscherie où du sang est projeté à l'écran). De Palma se fait plaisir et nous refait même le coup de la fausse fin. Cette seconde partie est même gratifiée d'une musique Herrmanienne au possible et plongeant le film dans les ténèbres et le suspense.
De Palma a donc l'air de se faire plaisir et revient à ses premiers amours. En remakant Alain Corneau, De Palma trouve surtout un prétexte de faire intervenir à l'écran toutes ses marques de fabrique et jubile derrière la caméra grâce à un scénario bien ficelé. Comme d'habitude on pourra lui reprocher ses fautes de gout et son grand guignol, mais comment en vouloir à quelqu'un qui aime à ce point Hitchcock. On lui pardonnerait tout! (enfin presque, Mission to Mars, Femme Fatale, ... hum hum)