Possessions
La grande couture est une affaire d’orfèvrerie, un art délicat qui demande une minutie, un calme, un silence monacal. C’est dans cette vie-là, au côté de sa sœur Cyril, que Reynolds Woodcock a décidé...
Par
le 15 févr. 2018
129 j'aime
4
Day-Lewis a de moins en moins été le réalisateur officieux des films où il joue. Avec Phantom Thread, il atteint le sommet et l'équilibre de son incroyable précision d'acteur (et seulement d'acteur). Il est à sa juste place, presque humble, ce qui en fait le film parfait pour signer la fin (temporaire ?) de sa carrière.
Absorbé sans être obsédé, il campe un grand couturier maniéré et maniaque qui tranche avec sa précédente collaboration avec Paul Thomas Anderson, There Will Be Blood, en ce qu'il y jouait un homme sans faiblesses, et aussi en ce que Phantom Thread pourrait être dépourvu de cahier des charges. Avec son ambiance qu'il est doublement juste de qualifier de « feutrée », c'est un film d'un calme assourdissant qui n'enferme le spectateur en rien, alors même qu'il se propose de dépeindre la fermeture d'esprit de son personnage principal. Il sait aussi traiter de la chosification de la femme sans en faire un crédo ni un obstacle.
Accompagné par la musique de Jonny Greenwood sur 90 de ses 130 minutes, il traite de bouleversements avec sérénité, nous faisant sentir parfaitement en sécurité, cosy. C'est une odyssée d'acceptation et de douceur qui nous fait traverser toute son histoire comme un rêve. Les quelques lenteurs sont vites oubliées, tout comme les rares raccords d'écriture un peu rapides qui pourraient nous dissuader de la maestria d'Anderson aussi bien en tant que scénariste qu'en tant que régisseur (et quasi-directeur photo, aussi, puisqu'il n'en avait pas). Heureusement, il n'était pas seul : j'ai un peu menti en disant que Day-Lewis n'était qu'acteur, vu qu'il a officieusement co-écrit le film.
Enfin, il fait graviter ses protagonistes avec élégance autour de leurs points forts. Lesley Manville, qui joue la sœur du grand homme, développe avec charisme et caractère ce qui fait une grande femme dans l'imaginaire collectif. La chaleur de Vicky Krieps, la muse, n'a d'égal que l'intelligence symbolique de ses manœuvres retorses. Œuvre au rythme unique, pas genrable sinon par sa vocation de mettre l'amour à l'honneur, Phantom Thread est une des grandes réussites discrètes des années 2010.
Créée
le 10 août 2020
Critique lue 475 fois
D'autres avis sur Phantom Thread
La grande couture est une affaire d’orfèvrerie, un art délicat qui demande une minutie, un calme, un silence monacal. C’est dans cette vie-là, au côté de sa sœur Cyril, que Reynolds Woodcock a décidé...
Par
le 15 févr. 2018
129 j'aime
4
Il y a quelque chose d'étrange dans Phantom Thread ainsi que dans la carrière de son auteur Paul Thomas Anderson, l'impression d'une rupture avec ce qu'il a pu réaliser jusque-là, lui qui traverse...
le 17 févr. 2018
64 j'aime
17
Phantom Thread figurera sans doute tout en haut des tops 2018 point de vue technique, tant sa réalisation frôle la haute couture. Ca tombe bien puisqu'on est pile dans le sujet du film. Minutie de...
le 20 févr. 2018
57 j'aime
12
Du même critique
Quand on m’a contacté pour me proposer de voir le film en avant-première, je suis parti avec de gros préjugés : je ne suis pas un grand fan du cinéma japonais, et encore moins de films d’horreur. En...
Par
le 25 oct. 2018
8 j'aime
(Pour un maximum d'éléments de contexte, voyez ma critique du premier tome.) Liu Cixin signe une ouverture qui a du mal à renouer avec son style, ce qui est le premier signe avant-coureur d'une...
Par
le 16 juil. 2018
8 j'aime
1
Si vous entendez dire qu'il y a Cluzet dans ce téléfilm, c'est vrai, mais attention, fiez-vous plutôt à l'affiche car son rôle n'est pas grand. L'œuvre est aussi modeste que son sujet ; Ledoyen porte...
Par
le 25 août 2018
7 j'aime
3