Geppetto au pays des aveugles
Le Pinocchio de Walt Disney peut se féliciter d'avoir participé à la réputation d'une marionnette, issue d'un conte non issue du recueil des frères Grimm. Si histoires et dessins sont magnifiques, les scènes vibrantes, l'écart entre les personnages de Pinocchio et du marionnettiste n'est pas dénué d'intérêt.
En effet, PInocchio est le héros du film, né par insufflation magique de la fée (l'ange bleu), imparfait, il demeure cette figure de bois, mis à l'essai. Surprenant le bon Geppetto n'est pas un marionnettiste, il est horloger. Alors que Stromboli n'est qu'un vulgaire consommateur des figures de bois, il les use puis les brûle, Geppetto est un fabriquant de système complexe, d'automates qui simule la vie. Cette figure de père, imparfait comme son objet de convoitise soit stérile, ne peut donner la vie qu'à des automates, justifié par son statut de célibataire. Surtout il possède des lunettes mais ne voit pas
Geppetto passant sa vie à élaborer ses mécanismes est non-voyant. Seul personnage qui ne se doute de l'existence de la fée, il prie aveuglément pour que sa figure de bois devienne vivante. Malgré le passage fracassant de celle-ci, il est le seul à ne pas être conscient de sa présence, endormi (comme toujours). Plus attentif à l'oreille qu'aux yeux, ce bon vieux Geppetto se fait avoir par deux fois lorsque Pinocchio lui parle. La première fois à son réveil en marionnette, la seconde fois en tant qu'enfant. Enfin il passe totalement à travers lorsqu'en cherchant Pinocchio, il passe devant l'attelage de Stromboli.
Pourquoi l'avoir affublé de cette tare, le vieil homme souffrant déjà de solitude, il est aveugle car il ne se guide plus que par sa foi. Le film basé sur une figure de bois n'est qu'une manière de composer autour d'un thème chrétien, sans l'avouer. Notre bon Pinocchio, figure de bois comme il aurait pu être de glaise, à qui on donne vie, conduit par sa conscience, suit son chemin libre de choisir le bon ou le mauvais chemin (plus amusant et plus facile). Le bon vieux Geppetto, par sa sagesse, ne fait pas confiance au sens de la vue car il est le plus trompeur. Son expérience d'horloger lui a prouvé que seul l'écoute attentive, conduit à voir tandis que tout ce qui est visible, brille n'attire que les idiots. Son expérience de créateur d'automate lui a appris que ce qui bouge n'est pas ce qui vit.
Pinocchio lui est attiré par la vue, ses grands yeux devenus animés le rendent totalement idiot, il se fait avoir par tous les artifices. Il est une proie idéale pour brigands, facile à convaincre.
Pour laisser en suspens cette reflexion, ce petit Walt Disney demeure un objet visuel qui tend à nous séduire, là où le pêché apparait. Finalement les scènes horribles, les figures d'enfants devenant ânes, tout n'est qu'éphémère et seule la morale, le sens n'a de véritable valeur.
PS. Des enfants qui fument des cigares et boivent de la bière, les merdeux des années 40 comparés à ceux de nos jours font bien mentir les cons qui parlent de la mauvaise éducation des jeunes générations