Porco Rosso
7.7
Porco Rosso

Long-métrage d'animation de Hayao Miyazaki (1992)

Bon, je dois vous faire un aveu. La première fois que j'ai vu ce film, je me suis dit que je ne l'aimais pas. Mais comme c'est Ghibli et que j'étais embêtée, je l'ai encore regardé. Mais non. La sauce n'a toujours pas pris. Je me suis donc résignée. Et puis, quand je me suis décidée à le revoir justement pour en faire cette critique (car je revisionne systématiquement le film avant), ne me demandez pas pourquoi, mais j'en suis sortie tout heureuse et éblouie. Oui, vraiment. Et pourtant, je n'ai pas pris une seule once de maturité en plus et je n'ai rien compris de plus cette fois, mais sans que je ne sache pourquoi, quelque chose a fonctionné soudainement sur moi. Alors c'est certain que "Porco Rosso" n'est pas mon Miyazaki préféré, mais je me rends compte maintenant de l'expérience que j'ai raté !


Avec le recul de mes trois visionnages et de leurs expériences différentes, je pense que la grande force de "Porco Rosso" est sa galerie de personnages. Exit les jeunes héros de même pas vingt ans, place à des hommes et des femmes qui ont vécu, exepté Fio, qui elle, reste une adolescente myazakienne typique. Et ce changement ne fait pas de mal. Porco "Marco" Rosso est ainsi un homme, ancien pilote de la 1ere guerre mondiale, devenu depuis un cochon suite à un sortilège mystérieux. Cynique, macho, solitaire et séducteur, il gagne sa vie en étant chasseur de prime à bord de son hydravion. Il est surtout un homme blessé, ayant perdu toutes ses illusions de jeunesse suite à la guerre et à la mort. Le personnage, avec sa moue désabusée, parfois drôlatique sous ses lunettes noires, n'a pas de mal à gagner l'adhésion du public malgré ses défauts. Sa transformation en cochon apporte un côté fantastique appréciable, d'autant que l'interprétation de celle ci est tout entière laissée à l'imagination et au ressenti du spectateur. Porco est entouré de deux femmes remarquables : Gina, son amie d'enfance, qui elle aussi n'a plus d'illusions, vit dans une grande mélancolie depuis qu'elle a perdu trois de ses maris, tous pilotes, successivement. Romantique et en attente vis a vis de Porco, elle n'en demeure pas moins une femme très forte, qui n'hésite jamais à agir par elle-même. Fio, jeune fille de 17 ans, apporte un peu de fraicheur au sein de l'ensemble mais aussi au sein du coeur même du pilote, qui tombe sous son charme rapidement. Dynamique, encore pleine de joie, elle est la seule capable de percer la carapace de Porco... et de remettre en place ce macho quant à ses idées sur les capacités des femmes ! Ces trois personnages sont tous très réussis, mais les personnages secondaires ne sont pas en reste, que ce soit Curtiss, caricature gentillette de l'américain ambitieux, ou les Mama Aiuto, llus drôles que menaçants, du même genre que les pirates du Chateau dans le Ciel.
Porco Rosso est aussi l'un des films de Miyazaki les plus drôles. Les situations comiques sont nombreuses, et ce dès le début du film, alors que les Mama Aiuto prennent en otage des petites filles qui se révèlent, en réalité, tout sauf effrayées et les rendent rapidement fous ! L'humour est ici très agréable, sans être loud, disséminé par petites touches au sein d'un dialogue... plusieurs sourires sont à prévoir.


Le scénario de Porco Rosso, lui, se situe dans la moyenne haute du studio. L'histoire se veut assez simple, mais repose sur des éléments politique réels. Prenante, mais non haletante, elle ne laisse pas l'ennui prendre sa place, mais ne marque pas excessivement non plus. On ne trouve pas dans Porco Rosso d'épique, d'aventure. Ce n'est pas non plus une tranche de vie où les sentiments prennent place. Il n'y a pas de grandes réflexions (a part tout ce qui a trait à la transformation de Porco et la guerre). Les principales ambiances retrouvées au sein du film sont ainsi plutôt mélancoliques, poétiques et romantiques. En ressort quelque chose d'infiniment délicat, en dépit des scènes d'action et de bagarre viriles... C'est peut-être pour cette raison que le film est moins accessible que certains et qu'il m'a fallu reellement me l'approprier. Certaines scènes tirent ainsi leur épingle du jeu, dans des registes différents. La longue scène finale, emplie de drôlerie, et bien sur, la fameuse scène de la "voie lactée des avions", portant en elle tout un symbolisme et une poésie inimitables, en plus d'être la clé de voute de l'ensemble. Miyazaki reste fidèle à lui-même en ce qui concerne la grandeur de sa mise en scène.


Je ne détaillerais pas l'aspect visuel, qui, bien sur, est remarquable. Le décor idyllique de l'Adriatique et de l'Italie -sublimées- sont superbement mises en images. L'île de Porco donne irrésistiblement envie de la visiter, tandis que les reflets de la mer sont une réussite... La musique, elle aussi, est très belle et ne s'oublie pas après le visionnage, sans cependant figurer dans les partitions les plus marquantes.


Manifestement, j'étais passée à coté de quelque chose les premiéres fois, car ce Miyazaki "mineur" ne manque pas de charme et d'intérêts. C'est avec joie donc, que je peux maintenant m'approprier ce petit bijou souvznt méconnu.

Presci1508
7
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le 17 juil. 2016

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Presci1508

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