Aborder la science-fiction de manière réaliste est en soit un contre-sens, pourtant Denis Villeneuve s'attaque surtout aux fondamentaux de notre propre race par le biais des extraterrestres. C'est d'ailleurs avec l'humanité, de la naissance à la mort qu'il ouvre son film en s’immisçant dans la vie privée de son personnage principal.
L'excellente idée du film repose sur l'art du langage, non sans se targuer des habituels scientifiques, l'accent est porté sur cet art premier qui nous unie tous aussi bien qu'il nous différencie. En proposant de voir l'arrivée des aliens par le biais du langage Villeneuve offre alors une nouvelle possibilité dans le cinéma de genre.
Louise la linguiste est donc notre regard sur cette arrivée peu banale, astucieuse mise en scène que de voir un monde apeuré uniquement par le prisme de ce personnage. Il nous donne assez pour installer son film dans un contexte de rencontre extraterrestre avec son lot de peurs humaine, mais surtout dépassant cette unique pensée d'un étranger malveillant. Louise reflète alors la possibilité d'une communication, à l'image de notre propre culture habituée à communiquer dans un passé d'invasions continuelles d'une tribu à l'autre.
L'apprentissage va pourtant trop vite, à la différence d'un Nolan bavard, Villeneuve ne veut pas effrayer son public, la lenteur de sa mise en scène étant déjà un pari risqué. Il n'empêche que le sujet aurait eu besoin d'être plus approfondi tellement il est passionnant. Alors que le spectateur est habitué à vivre des rencontres extraterrestres, le réalisateur parvient tout de même à installer un climat, une aura telle qu'on retient son souffle quand on part à la découverte de ces nouveaux venus. Intimiste mais grande, la mise en scène offre un spectacle paisible mais à la hauteur.
Le scénario n'est pas sans faille, à l'image du langage pas assez détaillé, il reste des erreurs grossières, sorte d'éléments perturbateurs un peu trop caricaturaux : le conflit avec les russes et les chinois bien que certainement plausible donne une fois encore une image réductrice d'union. Et que dire de la révolte de quelques soldats, si elle génère des tensions elles ne sont pas ce que l'on retient du film.


Et puis il y a ce message, ces souvenirs très malickiens, dont on sent qu'ils jouent un rôle important pour délivrer son twist (maladroit même si j'en comprend le besoin) : l'acceptation de vivre un bonheur qu'on sait éphémère est beau en soit mais il nous reste en tête que ce don aurait pu être exploité d'une autre façon. Le temps devient alors une boucle et non une ligne, ce qui me dérange toujours un peu.


Premier Contact entre dans le cercle intime des bons films de science-fiction, abordant le sujet primordial de la sémantique comme un art pas toujours compris et de son importance pour se comprendre. Mais surtout parce que sa mise en scène qui emprunte sait aussi l'inscrire dans quelque chose de nouveau. La découverte de l'autre sur un plan réaliste et plausible par l'approche du langage. Son message aussi perturbant qu'il puisse être vient conforter la théorie du film pour surpasser notre propre pensée terrienne.

LuluCiné
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le 20 déc. 2016

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