Souvenons-nous.
Mi-2011, Ridley Scott annonçait son grand retour dans le cinéma de science-fiction avec une nouvelle des plus fracassantes : un film de S-F relativement horrifique qui serait une sorte de "prequel" à... la saga "Alien", rien de moins. Bien évidemment, cette news ne manqua pas de faire le buzz sur les réseaux sociaux et de susciter l'excitation des fans de S-F comme des cinéphiles purs et durs, ravi de voir à nouveau l'ami Ridley revenir aux sources d'un genre cinématographique qu'il aura contribué à renouveler, et ce près de 30 après son mythique "Blade Runner".
Dès lors, les infos et autres bandes-annonces relatives à ce nouveau film ne cessent d'affoler la toile. Finalement baptisé "Prometheus", ce nouveau long-métrage de Ridley Scott se présentera donc, selon ses dires, comme une sorte de petit frère du 1er Alien.


Et puis voila qu'arrive la date du 30 mai 2012, jour de la sortie officielle du film et là... pschiiiiiiiiit ! Le film, qui faisait les bons jours d'internet et des réseaux sociaux depuis près d'un an, doit soudain faire face à un assaut vaste de critiques violentes et de réactions indignées, certains n'hésitant pas à déclarer que Ridley Scott, au vu de son grand âge (75 ans à l'époque) est désormais bon pour la retraite.


Plutôt que de tenter de savoir si oui ou non "Prometheus" (le tant attendu film-dérivé de la saga Alien),mérite autant de haine, demandons-nous, de façon plus objective, s'il s'agit véritablement d'un bon film.
Bien qu'au cinéma, il n'y ait jamais à propos parler de vérité exacte, force est de constater que, après visionnement et re-visionnement, "Prometheus" se révèle être malheureusement un film à moitié raté et terriblement bancal, qui prêche par ses longueurs inutiles, sa philosophie de comptoir et surtout son côté terriblement grandiloquent, qui fait qu'au final, on ne comprend pas trop ce que Ridley Scott a souhaité nous montrer durant 2 heures de film.
S'agit-il au fond d'un véritable film-dérivé d'Alien ? D'un quelconque "prequel" ? (à savoir un film dont l'action se situe avant celle des autres films de la saga) ou encore d'un reboot déguisé ?
Non content de ne proposer aucune réponse à ces questions, l'ami Ridley se contente (et c'est là que le bas blesse) d'un signer un film terriblement banal, fade, sans âme et sans saveur, un thriller de S-F sans originalité aucune et (osons le dire) sans grand intérêt si ce n'est celui, bien puéril, de montrer que, le temps d'une scène bien cauchemardesque, Ridley est encore capable de filmer.


Le gros problème de "Prometheus" est qu'il prétend traiter de thèmes hautement philosophiques (la rivalité entre Dieu et l'homme, le mystère de la vie, le rapport psychologique entre l'homme et la machine) qu'il laisse très vite de côté pour tout miser sur l'action, l'horreur et les effets spéciaux pour au final aboutir à un résultat limite indigeste; un peu comme si Ridley Scott n'avait utilisé ces thèmes philosophiques uniquement comme un argument commercial destiné à attirer un large public en salles. Un comble, pour un cinéaste ayant jadis contribué à la grandeur du cinéma de science-fiction contemporain.


Tandis que pour le 1er Alien, le cinéaste avait su utiliser avec brio et efficacité les maigres outils mis à sa disposition pour au final accoucher d'un chef d'oeuvre qui est depuis resté dans toutes les mémoires, il fait totalement l'inverse dans "Prometheus", c'est-à-dire utiliser les gros moyens mis à sa disposition pour au final ne pas raconter grand chose d'intéressant.
Débarrassé de tous ses artefacts pseudo-philosophiques, le scénario de "Prometheus" tient en tdeux lignes (une équipe de scientifique contraint de faire face à une menace encore inconnue et d'une dangerosité implacable).
Ajoutons à cela les éléments typiques du genre (du sang, des morts) et vous obtenez un gros film po-corn tout juste distrayant, vite vu vite oublié.
Alors certes, on ne pourra pas reprocher à Ridley Scott quelques points positifs : la photographie sombre et plutôt soignée et, comme déjà évoqué un peu plus haut, une séquence d'horreur pure tellement tendue qu'elle suffirait à décourager pour de bon toutes les personnes favorables à l'avortement.
Malheureusement, ces éléments se comptent sur le doigt d'une main et se noient dans une surenchère visuelle et pyrotechnique de très mauvais goût (ah mon dieu, ce que les CGI peuvent être moches quant ils sont trop sur-exploités !) et dans un scénario condamné par son affligeante banalité (quasi toutes les péripéties relèvent du vu et du déjà-vu) qui, à titre de comparaison, ferait presque passer celui d'Alien la résurrection pour un modèle d'originalité.


Donc oui, en jugeant ce film en tant que tel et non pas en le confrontant aux quatre films de la saga Alien, on peut donc affirmer sans peine que "Prometheus" est un gros coup d'épée dans l'eau et que Ridley Scott semble avoir été plus préoccupé par l'argent que par une véritable ambition artistique, par l'envie d'offrir un spectacle de S-F et d'horreur neuf, ce que "Prometheus" n'est à aucun égard.
Si l'on devait néanmoins retenir deux-trois choses de ce vaste gâchis, outre la séquence horrifique déjà évoquée, ce serait l'interprétation à la fois inquiétante, ambigüe et touchante de Michael Fassbender dans le rôle de l'androïde David, qui parvient à rendre crédible un rôle pourtant peu intéressant car relevant à nouveau du déjà-vu (David pouvant se voir comme l'ancêtre de Bishop, l'androïde malfaisant du 1er Alien).
Idem pour Noomi Rapace et Charlize Theron qui, en tant qu'excellentes comédiennes qu'elle sont, arrivent malgré tout à faire exister leurs personnages respectifs.


En somme, plutôt que de révolutionner le genre ou de prétendre l'embellir d'avantage, "Prometheus" se contente de se rajouter à la (très) longue liste de films de S-F, en ne lui apportant rien neuf, et en se vautrant dans un mauvais goût plus que complaisant : la paresse narrative, la manière facile dont Ridley Scott balance au visage de spectateurs ses références cinématographiques (le chef d'oeuvre "Lawrence d'Arabie" de David Lean utilisé comme un gadget de luxe), ses personnages peu attachants car réduits à des caricatures d'eux-même (l'androïde malveillant, la capitaine froide et coincée, la scientifique intello, le commandant rebelle), sans parler de son final honteusement grotesque.


Au final, un film qui n'a d'autre intérêt que de prétendre être lié de près ou de loin à la saga Alien que Ridley Scott avait pourtant somptueusement inauguré près de 30 ans plus tôt.


Les temps changent, les cinéastes aussi !

f_bruwier_hotmail_be
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le 15 mai 2017

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