A l'origine de Prometheus, un fantasme de cinéphile (élargir l'univers d'Alien.) Après des décennies, Scott met enfin en scène un film autour des mystères du premier épisode. On sait que l'écriture devait se reposer sur la scène du "space Jockey", où l'on voyait un extraterrestre fossilisé sur une sorte de commande de bord.
Le film lève une partie du voile sur ce qui caractérise ces créatures, désormais désignées comme les "ingénieurs" (physiquement très proche des humains, dans une échelle trois ou quatre fois plus grande) mais sans trop désacraliser le mythe non plus en leur donnant une importance plus que déterminante sur l'histoire de la Terre (ce qui représentait un exercice d'équilibriste assez dangereux.) Il n'y a pas la profusion permanente d'effet spéciaux d'un Avatar. L'esprit d'Alien est entretenu avec des idées plus larges, en partie sur l'origine de la création de l'homme dans une scène d'introduction sacrificielle qui se calque sur la théorie de Darwin (en se jetant dans le ravin, l"'ingénieur" laisse son ADN dans le premier élément qui produit la vie, c'est-à-dire l'eau.)
On n'échappe pas à deux ou trois personnages secondaires juste là pour amuser la galerie (les mêmes travers que James Cameron quand il a réalisé Alien 2 ou Abyss.) Mais les trois personnages principaux ont droit à des places de premier choix. Noomi Rapace, parfaitement calibrée pour le rôle, se paye une scène d'anthologie où elle doit jouer de son instinct de survie. Charlize Theron sait rester stoïque mais aussi défendre son statut et Fassbender est un 4ème androïde dans la ligné de la saga Alien.
Un peu trop dans la ligné justement...
Le bémol, est que Scott utilise, même s'il le fait bien dans la forme, des contextes de crise déjà-vu. Quelques exemples en vrac:
- Devoir se débarrasser d'un corps étranger par chirurgie avant l'accouchement mortel
- Le rôle de l'androïde qui est parfois ambigu
- L'androïde qui est décapité et continu de parler
- La procédure de quarantaine, similaire à Alien, où Weaver refusait de faire entrer une personne contaminé dans le vaisseau
Etc.
Ces ''terrains connus'' empêchent le film de jouir de tensions plus fortes et de plus de surprises, mais confère à l'ensemble l'aura d'une oeuvre de SF spectaculaire avec des petits mystères et des pistes narratives pour laisser l'imagination boucher des "liens".
On attendait beaucoup de Prometheus, mais la concurrence est assez rude.
Grâce à leur contexte de survie plus neufs, des films comme Sunshine (le soleil se fait dévorer) et Solaris (la planète semble contenir une conscience et répondre par stimulis aux individus) font sans doute beaucoup mieux. Pour le premier, la musique électronique d'Underworld et John Murphy apportent un lyrisme et une intensité sans doute plus efficace. Pour le second, la musique de Cliff Martinez avec ses percutions métalliques participe à un sentiment de confinement et d'isolement fascinant, qu'on a difficilement trouvé ailleurs dans les films de SF, sinon dans le premier Alien.
L'ambiance naturelle de Prometheus arrive à palier à une musique assez convenue, tout juste "accompagnatrice". Un peu frustrant tout de même quand on a connu l'OST de Jerry Goldsmith (Alien.)
On reste malgré tout face à un film de science fiction qui sait profiter d'une mythologie, même si on ne se retrouve pas devant l'évenement espéré.
Sans doute que "Prometheus" était trop attendu comme l'aboutissement d'un genre à lui tout seul.