La punition du spectateur

Certains personnages semblent impossibles à adapter. Que ce soit à cause d'un univers difficilement représentables ou de conditions de production, il semble qu'une certaine partie des protagonistes principaux de la pop-culture ne parviennent pas à être dûment représentée sur grand écran. C'est le cas du Punisher, qui s'était déjà fait violer deux fois par le passé, et tandis qu'une troisième adaptation se profilait à l'horizon, on espérait que le célèbre dicton se tromperait.

Alors qu'il adopte un ton beaucoup plus violent et comics que les films déjà réalisés, ce Punisher : War Zone semblait être l'adaptation que l'on attendait enfin, la représentation cinématographique de tout ce qui fait la mythologie du personnage, de ses personnages sadiques à ses ruelles glauques. Mais aussi vrai que les deux premiers étaient de sacrés échecs, celui-ci ne déroge pas à la règle et se vautre lamentablement. Après tout, jamais deux sans trois...

Parce qu'au final, le film ne tient du comics qu'une facette superficielle : c'est un enrobage fait main, sans moyen, visuellement grossier. Le film refoule le cgi, le mauvais cgi. Les fonds verts se remarquent à des kilomètres, et tandis que le métrage en est jonché, le spectateur commence à sortir de l'histoire. L'impression de voir une oeuvre intégralement tournée en studios s'emparera de nous pour ne plus jamais disparaître de notre esprit.

C'est laid, vulgaire, à la fois terne et flashy, à mi chemin entre le ridicule et le dégueulasse. On tient là une parodie de ce que devrait être une adaptation du Punisher, parodie qui croit qu'il suffit de tomber dans l'excès le plus total pour que le contrat soit respecté. On se retrouvera donc avec des séquences exagérées au point d'en perdre crédibilité, à l'image de cette fameuse scène de rencontre entre Soap et Budiansky, où l'on comprendra que ce ne sont pas que quelques dossiers qui concernent Castle, mais bien la salle entière.

L'on pourrait également citer le sang qui gicle pour un rien, les chargeurs à munitions illimitées, les corps qui se démembrent comme du polystyrène : c'est drôle au départ, pour rapidement virer au grotesque le plus total. Le soucis vient surtout du fait que le film tente de nous impressionner sans avoir les ressources pour y parvenir. En résultera une oeuvre handicapée par ses moyens qui se retrouve toujours dans l'excès sans comprendre qu'elle n'a pas assez de fond pour assurer le spectacle.

A la limite, si la réalisatrice du film, Lexi Alexander, avait eu conscience des défauts de sa production, elle aurait pu jouer avec et nous faire oublier, durant les deux heures que dure le film (un peu moins), la faiblesse de son budget. On se retrouve donc avec un nanar de petite ambition, aux acteurs ridicules (il faudra voir le surjeu de West et Hutchison, ainsi que la monotonie déprimante de Stevenson) et au rythme bâtard, bien géré au départ pour finir par ne plus rien proposer d'intéressant.

Une lenteur dûe à la pauvreté de la mise en scène, qui sonne mauvais dtv tout le long et ne parvient plus, une fois l'introduction passée, à rendre son action un tant soit peu intéressante. On se retrouvera donc à observer l'oeuvre se dérouler sans grande conviction, regardant un film d'action banal comme on boirait un verre d'eau sans avoir grand soif. C'est plat, fade, mal maîtrisé, mal interprété, à peine divertissant. On regarde souvent sa montre, rarement le film. Quand viendra donc l'adaptation que mérite le personnage? Pour l'instant, à défaut de punir les malfrats de sa ville, ce sont ses fans que le Punisher se charge de punir...