La fois où j'ai failli ne pas me perdre dans un film de Dupieux

Quentin Dupieux vient de finir sa trilogie du 5D, dont les films forcément reliés par le style caractéristique du réalisateur, sont pourtant très différents. On était donc en droit de se demander ce que l'ovni du cinéma français nous réservait cette fois ci.

Après un "Wrong Cops" hilarant, il semble que Quentin ait envie de revenir aux thèmes qui lui sont chers : le cinéma, la vision de l'artiste, les contraintes qu'il rencontre, et plus simplement l'art. Alain Chabat se morfond de filmer de la médiocrité, et rêve d'idées géniales. Il se lance dans une parodie de "Rubber", mais personne ne semble comprendre la véritable portée de son film, pas même lui (Quentin s'amuse encore à nous disséminer des critiques sociétales faciles, de cette façon il nous perd dans son récit, mais dans la double lecture du film également. Si tout se passe bien, le mindfuck est déjà là). S'en suit des scènes surréalistes, qui n'avaient pas quittées le réalisateur. Mais on retrouve par contre leur sens, donnant au cinéma de Dupieux une dualité humour/philosophie extra-ordinaire.

Le duo d'acteurs géniaux Alain Chabat / Jonathan Lambert nous offre peut être la meilleure scène de Dupieux, hilarante, et toujours aussi bien filmée, rappelant cette scène mythique de "Wrong Cops" avec un... Producteur ? Oui, encore une fois, Quentin s'en prend à ces vils impatients superficiels (ou serait-ce pour nous mener vers de fausses pistes encore une fois ?).

Après une heure de sans faute, on regrettera les dernières vingt minutes complètement WTF, où le français s'amuse à perdre le spectateur. On connaissait son talent pour le faire, et on aimait ça (on se souvient de Nonfilm et de ses dialogues de mise en abyme sans fin). Toutefois, ici, le contraste avec la première partie du film parait trop important, et on fini déçu de ne pas pouvoir suivre le film jusqu'au bout, alors qu'il se faisait presque lisible jusqu'ici.

Quentin Dupieux reste un génie. Il cherche principalement à créer son style cinématographique, et se permet d'envoyer bouler les grands classiques, que ce soit en parodiant une scène culte de "Schindler's List", ou en faisant dire à son dictaphone des insanités sur le plus grand réalisateur de tous les temps (ne serait-ce pas ça, le plus grand gémissement de l'histoire du cinéma, celui qui permet de s'affranchir de l'académisme ?). Son dernier film s'affirme comme une continuité dans sa filmographie, sans grande surprise, mais toujours aussi réussi !
Mayeul-TheLink
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le 23 févr. 2015

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Mayeul TheLink

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