Si t'as compris, tu mens!
Avec « Wrong Cops » sorti début 2014, Quentin Dupieux signait à la fois une comédie grotesque génialement drôle (ou grotesquement géniale éventuellement) mais laissait aussi planer le doute quant à son avenir. En effet, on voyait mal comment il pourrait encore se renouveler suffisamment ou se montrer aussi inspiré sur ce créneau dans le futur.
Du coup, l’annonce de « Réalité » à peine un an plus tard pouvait laisser perplexe, d’autant que le trailer (où la patte du réalisateur était immédiatement identifiable) laissait penser qu’il s’agissait à nouveau d’une comédie.
A vrai dire, « Réalité » n’est pourtant pas à ranger dans la même catégorie que son prédécesseur. Ce sixième long métrage de Quentin Dupieux est vaguement drôle parfois, mais il n’a pas vocation à marcher sur les plates-bandes
de ses réalisations antérieures. Oubliez donc les bonnes tranches de rigolade, « Réalité » n’excelle pas dans ce domaine et ce n’est, semble t-il, pas son ambition.
Difficile de la définir exactement d’ailleurs. En proposant une même histoire qui semble se dérouler dans trois univers parallèles qui « communiquent » entre eux par moment, Dupieux brouille les pistes et fait tourner la matière grise du spectateur. A la sortie, ce dernier se demande ce qu’il a raté pour reconstituer le puzzle, avant de se rendre compte que tout cela n’a finalement ni queue ni tête, même si l’on trouvera sûrement quelqu’un de très malin pour nous dire l’inverse.
Partant du postulat que l’on accepte de regarder un film qui n’a aucun sens, « Réalité » reste relativement sympa pour ceux qui appréciaient Dupieux jusque là. Toujours les mêmes lumières, un thème musical récurrent, quelques « auto-références » une fois de plus, mais aussi cette savoureuse cohabitation entre acteurs bien de chez nous comme Chabat et Lambert (Jonathan hein, pas Christophe) et acteurs américains évoluant à domicile, à savoir dans une Californie qui a souvent servi de cadre aux productions de Dupieux. Bref, en cela « Réalité » reste relativement distrayant mais ne décolle finalement jamais vraiment et on se surprend à le trouver un brin monotone.
On n'attendait pas de la part de Quentin Dupieux qu’il nous livre une œuvre consensuelle, mais pour le coup, certains lui reprocheront d’avoir joué les apprentis David Lynch là où d’autres apprécieront la folie de l’œuvre.
Au final, on ne sait pas vraiment quoi tirer de ce « Réalité » : coup de génie ou imposture ? A vous de voir.
Mais s’il mérite probablement d’être vu plusieurs fois, on est tout de même en droit de se montrer assez dubitatif après le premier visionnage...