Il y a, dans Red Sparrow, un projet de mise en scène assez fou. On comprend très vite qu'il s'agit de mettre en parallèle, d'un côté, la soumission corporelle extrême que subit le personnage à l'intérieur même du récit et, d'un autre, le dévouement exceptionnel avec lequel Jennifer Lawrence offre son corps au film lui-même. C'est assez fou, également, de remarquer qu'aucunes presses, ni même aucuns critiques amateurs très présents sur la toile n'ont remarquer un tel parallèle, un tel projet de mise en scène qui entraîne le film immédiatement dans une autre sphère que le vulgaire film d'espionnage.
Plus le film avance, plus il est claire que Red Sparrow se construit tantôt comme une Eglise à la gloire de sa comédienne, véritable icône, sans laquelle le film lui-même n'aurait pas de raison d'exister, et en même temps un sarcophage, entièrement dédié à enfermer le corps de Jennifer Lawrence, à le substituer, le préserver de notre regard pour ne plus nous laisser qu'avec l'idée de celui-ci. Comme si ce film allait être le dernier.
La violence, dans Red Sparow, y est sèche, extrême, peu habituelle. Anti-commerciale même, tant elle intellectualise chaque situation plutôt que de la chorégraphier ou de nous la rendre spectaculaire. L'intrigue elle-même est complexe, dense, se déployant lentement sur le principe des poupées russes. On peut comprendre que la lenteur du film, ses nombreux dialogues, ont pu ennuyer les amateurs de série B et autres fanatiques du film d'action "qui ne cherchent qu'à se reposer la tête et se vider le cerveau".
Effectivement, Red Sparrow est un film complexe, très difficile à vendre, à faire exister sur le marché du cinéma américain tel qu'il existe aujourd'hui, entre DTV deluxe et syndrome du serial sans fin. Red Sparrow est définitivement un film à part, un film trés courageux. D'autant plus quand on réalise à quel point pour le cinéaste et la comédienne, mari et femme dans le privé, le sujet peut devenir personnel, presque intime.
C'est donc un film courageux, qui, pour exister, doit bien entendu faire des compromis (l'accent russe simulé, pour évidemment obtenir une sortie plus large et surtout des investisseurs) mais dois également avancer caché.
A l'image de son héroïne, justement. CQFD.


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le 22 nov. 2018

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