C'est chose faite, je suis allé et j'ai vu. Requiem pour un massacre, le film qui nous téléporte directement au coeur de la Biélorussie austère, archaïque, rurale, et autres qualificatifs appauvrissants au cours des années 1940.

Un tableau historique, tout simplement. Une oeuvre immanquable, par son réalisme à couper le souffle et par les superbes procédés d'Elem Klimov pour nous faire vivre cette expérience.

Les moyens mis en oeuvre pour représenter l'invasion du pays par les allemands, ainsi que le génocide qui en découle sont gigantesques. Des centaines de figurants saisissants de sincérité, des effets spéciaux tranchants de réalisme (cf : première scène de bombardement + fin), et le tout dans une ambiance parfaitement fidèle au contexte politique et géographique. On passera par les forêts, les bourgades misérables, et les déserts herbeux de Biélorussie. On y croisera les foules de réfugiés affamés, les villageois qui n'aspirent qu'à la paix et à leur vie de petit paysan, la petite armée dérisoire qui opposera résistance aux allemands qui croiseront notre route eux aussi...

Les quelques acteurs principaux sont incroyables. Alexei Kravtchenko, le vrai protagoniste est l'enfant typique de famille ultra-modeste, attiré par la guerre et les armes (au début de l'oeuvre). Son épopée est en fait une une désillusion cruelle de ce qu'est réellement la guerre. Un désenchantement monstrueux et traumatisant comme on peut le lire plusieurs fois dans son regard quand il apprendra métaphoriquement la mort de ses soeurs (poupées ensanglantées) ou quand il fera face à une femme violée, ensanglantée et réduite à l'état de mort-vivant. Sur son chemin, il va croiser Glasha (Olga Mironova), une fille étrange avec qui il ne trouvera encore une fois qu'un sentiment de trahison, de désabusement. Cependant, c'est par cette rencontre que l'on vivra les quelques moments de joie du film.

C'est le moment crucial de l'histoire de tout un peuple qui est représenté ici. Peut-on parler de manichéisme dans une telle œuvre ? Je ne m'y risquerais pas, et après tout on s'en fout complètement. Ce qui a eu lieu a bien eu lieu.
Par conséquent, c'est moralement très difficile parfois. C'est d'ailleurs moralement que Requiem Pour Un Massacre est aussi lourd de sens, on ne s'attarde pas sur l'hémoglobine (spoil : la mort de la vache est très dure, simplement par le son). La mise en scène est incroyable elle aussi, glauque, oppressante, sale. La bande son qui mélange l'oeuvre de Mozart à des ambiances sonores malsaines (bruits dérangeants, cris...) est quasi-parfaite : on se sentirait presque dans la tête de Floria. On a droit à de longs plans séquence très immersifs.

Le dernier tiers du film est le plus difficile, l'apogée de l'horreur humaine, le génocide. Et par le premier plan sur l'église, on ne peut deviner que le réel massacre va avoir lieu en son sain. Le film précise que le spectacle horrible auquel on assiste a eu lieu dans 650 bourgades du même genre en Biélorussie.

Come and see.

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le 29 nov. 2010

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Endless_

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