Herzog m'aura enfin réconcilié avec son globe-trotting anti-qualitatif. Peut-être en partie parce qu'il cesse d'être considéré comme un réalisateur marginal, merci à la MGM. Mais ce n'est pas pour autant qu'il se laisse aller à des américanismes, ni à la plaisance d'un spectacle agréable.
On part en direction du Viet Nam et des années 1960 pour pénétrer dans la jungle comme Forrest Gump, mais pas du tout de la même manière ; ici, on est sur un film biographique qui, malgré les critiques qui ont été faites sur sa rigueur (le vrai héros DeBruyn a été transformé en méchant... c'est plutôt l'inverse, d'habitude), a à cœur de se donner à fond. Ou plutôt de se faire donner à fond les acteurs, et notamment ce Christian Bale qu'on a l'habitude de voir dans la peau d'un super-héros plus classique, et qui va ici embrasser la jungle à pleins bras et de vrais vers à pleine bouche. Ç'a été un tournage éreintant ; il a perdu 25 kg pour le film. De quoi alléger l'œuvre de sa lourdeur... Car il reste très dur à voir ; jungle oppressante, ennemis aveuglés par la faim et l'absence de communications, environnement carcéral surnaturel (en tout cas pour le spectateur occidental auquel il faut des barreaux en alliages de plus en plus résistants pour atteindre une crédibilité minimale... belle ironie), danger permanent, faim, souffrance...
Le style mis à part, Rescue Dawn est un entremis de Papillon et Avatar ; un tournage « là-bas très loin » qui en tire de bons avantages pour une ambiance tout à fait unique, et des paysages qui donne au réalisateur-photographe tout un terrain de jeu à explorer. Mais pour une fois qu'Herzog entre en symbiose avec les moyens qu'il mérite, les effets spéciaux clochent et l'ambiance détone ; à vous de voir si ce micro-blockbuster indépendant doit trouver grâce ou détracteurs, mais je reste dans un doute plutôt corrosif.
Quantième Art