Tout comme, selon le dicton, les apparences, les titres aussi peuvent parfois être trompeurs.
Que cela soit engendré par malice ou maladresse, on en saura jamais rien.
Toujours est-il que nombreux sont les exemples d'œuvres bien mal nommées.


Harrison Ford lui-même blaguait que "Frantic" (en bon François, frénétique), un film dans lequel l'enjeu principal de son personnage est de retrouver sa femme disparue dans Paris, bien qu'il prenne quand même le temps d'apprécier un concert de Grace Jones, aurait mieux fait de s'appeler "Mildly disturbed" (modérément perturbé).


Bien sur, il n'y a pas que le 7ème art qui est victime de ce syndrome.


On pourrait dire de même sur la "République Démocratique Populaire de Corée du Nord" qui aurait du s'appeler la "Monarchie Dictatoriale de Corée du Nord", ou le parti "La République en Marche" qui aurait dû prendre le nom de "La République en Soldes - TOUT DOIT DISPARAITRE".


Zombieland 2 en est un nouvel exemple; analysons pourquoi.


Déjà il y'a le "2", qui promettait une suite et continuation des aventures de notre bande de joyeux drilles tueurs de zombies.
Hors plus les années ont passées, moins les choses ont changées.


Wichita a toujours du mal à construire une relation avec quelqu'un d'autre et n'accorde que très difficilement sa confiance.
Little Rock veut toujours jouer les filles de l'air parce qu'elle s'emmerde.
Tallahassee a toujours un fétiche qui deviendra son McGuffin dans le film.
Columbus a toujours une liste de règles à suivre, quand bien même la leçon du précédent film était précisément de les mettre à la poubelle.


Et bien sur l'histoire est encore une fois celle de Wichita et Little Rock abandonnant les deux mâles et à la fin, encore une fois on aura des humains qui stupidement attireront l'attention d'une horde de zombie à l'aide d'un spectacle son et lumière mal avisé.


Sans doute Sony s'est retrouvé dans une impasse en se demandant comment ils pouvaient rappeler le casting du premier opus, maintenant qu’Emma Stone a gagné un Oscar et Jesse Eisenberg a gagné une nomination.
Comment trouver un script qui puisse leur plaire à tous ?
La réponse était finalement toute trouvée : leur donner le scénario qu'ils avaient tous déjà acceptés en 2009.


Mais il n'y a pas que le "2" qui s'avère mensonger.
En regardant le film de Ruben Fleicher, on finit par se rendre compte que nous ne sommes pas dans un pays de Zombies comme le laisse entendre le titre.


"Zombieland" en réalité est un village.
Un village s'étendant sur plusieurs états d'Amérique, mais un village quand même.


Preuve en est, que le seul changement manifeste de cette resaucée, est la métamorphose du récit en roman pastoral ; ce genre complètement oublié et enterré, contant des histoires entre bergers et bergères.
On en trouve ici tous les poncifs : les enjeux des héros, loin de tout souci matériel (l'électricité fonctionne même après 10 ans grâce aux barrages hydrauliques, que le monde est bien fait !), se résument à trouver l'amour et/ou le garder.


Et à la fin, tous les protagonistes finissent par trouver leur ame sœur.
A l'exception d'Abigail Miskine, pour qui le "double tap" prend sens en tant que double punition: privée de copain, et privée de carrière cinématographique.


Cependant la comparaison au village ne s'arrête pas la.
Comme beaucoup de petits communes, notre Zombie Village devient très... conservateur.


La chasse devient le principal loisir, on offre des armes à feu pour les fêtes.
On se moque allégrement des hippies, des pacifistes, et allez pourquoi pas des Social Justice Warriors.


Par le plus grand des hasards, cette caste menaçant par leur philosophie de non-agression, de détruire les grands principes virils qui doivent demeurer inébranlables, vivent tous dans une gigantesque tour nommée "Babylone".


Et bien sûr, s’ils se font attaqués par des Zombies, d'aucun ne pourrait y voir ici, la Babylone honnie et punit par le tout puissant dans la Bible Chrétienne.


Moralité: si vous touchez au Second Amendement, la colère divine s'abattra sur vous.


Que c'est rassurant de constater que plus le temps passe, plus la société Américaine va vers un apaisement collectif.


Heureusement dans ce Village, il y'a quelques nouvelles têtes qui valent le coup d'y rester un peu plus.
En réalité, il ne s'agit juste d'une: Zoey Deutch, qui arrive avec son personnage caricatural de blonde cruche, à transformer le plomb en or, et à voler toutes les scènes ou elle apparait.


Et si quelques gags arrivent à fonctionner, d'autres sont à la limite du soutenable.
Au moins quand Shaun of the Dead nous faisait le coup des Dopplegangers, il en faisait une scène de 30 secondes, et non pas une séquence de 10mn interminable, et qui a le culot de croire que Luke Wilson est un acteur drole.


Idem, pour le post générique, qui vient nous rappeler que oui, c'est bien le réalisateur qui a pondu Venom qui est en train de diriger ce film.


Mais il y'aura certainement assez dans ce film pour plaire et caresser dans le sens du poil l'Amérique de la rust-belt.
Le film se conclue sur le quatuor accompagné de Rosario Dawson roulant vers l'horizon, laissant derrière eux les neuneus progressistes.


Qu'on est bien chez soi, entre nous, entre gens biens, nous crie le film.


Quand Sartre écrivait que "l'enfer c'est les autres", tout le monde a pris cela comme une apologie de la misanthropie.
En réalité, il n'en est rien : Sartre critiquait précisément le fait que l'on considère autrui comme "l'enfer" et qu'en rejetant toujours la faute, le péché sur autre que soit, on vit dans le déni de ses propres torts.


Et c'est peut être pour ca que nos héros continuent à rouler, à avancer quand bien même ils viennent de donner la preuve qu'ils tournent inlassablement en rond.
Quand on va quelque part, on n’a jamais le temps de se regarder dans la glace.

HugoShapiro
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le 3 nov. 2019

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HugoShapiro

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