Bad cop, good cop ? No, good cop, RoboCop !

(Toute la première partie de cette critique n'est qu'une remise en contexte de ce remake et de questionnements associée, le tout agrémenté de mauvaise foi et de procès d'intentions, ceux qui seraient tenté uniquement de lire la critique sur le film même aillent un peu plus loin, signalée par une coupure de tirets.)


« Un remake de RoboCop ? au bûcher ! » ; « Pouah, c'est nul, son armure est noire et on dirait IronMan ! » ; « Hollywood ne sait plus faire de grands films... » ; « On est pris pour des vaches à lait !:/ », telles étaient les premières réactions à l'annonce de ce RoboCop. Ces réactions grotesques qui m'ulcèrent par leur caractère bête, méchant et par conséquent, gratuit. Pourquoi ces réactions ? A peine l'annonce du film faite, que la plèbe internetienne se révoltait contre ce RoboCop, selon elle preuve d'un manque d'originalité flagrant, d'un manque de renouvellement, mais aussi de la preuve du foutage de gueule permanent des studios vis-à-vis de leur public. RoboCop 2014 n'est pas seulement l'histoire d'un remake, c’est l'histoire d'un film mort-né sur la plan critique (et l'on aurait même pu annoncer une mort commerciale, mais il semblerait que non finalement). L'histoire d'un film qui dès le départ fait l'objet d'un bash négatif et démesuré à son égard, pour des raisons franchement arbitraires. Et je trouve ça absolument grotesque. Je me suis battu pendant des mois sur les forums pour que ce film soit réhabilité à sa juste valeur (c'est à dire un film avec un réalisateur qui a fait ses preuves dans le cinéma social ET d'action – oh tiens, comme Verhoeven dis donc ! - un film qui est tirée d'une saga ultra populaire et dont on peut attendre certains standards de qualité – d'ailleurs on m'explique pourquoi certains tenaient tant à critiquer la qualité du film sur la seule base des trois photos volées du tournage ? - un film avec un budget très conséquent – ce qui certes n'a jamais été corrélé avec un quelconque gage de qualité, mais qui peut à défaut fournir des effets spéciaux pas trop mal foutus et le signe que le studio ne prend pas le projet à la légère.
Alors oui, c'est un remake, et alors ? On m'explique en quoi c'est faire preuve d'un manque d'originalité ? On peut très bien faire dan l'original en prenant un même support de base. Un remake a pour but de combler un déficit culturel ou générationnel en réactualisant un film par ses thématiques, ses intentions ou son univers. Et quoi de mieux qu'un film d'anticipation pour ça ?
Alors oui, il a un look IronMan (soit la plus grosse grogne des fans face aux premiers visuels), et alors ? Hey, les mecs, on est en 2014, si vous voulez des robots tanks qui font du 2 à l'heure dans un monde punko-taré et des DeLorean en guise de vaisseaux qui volent, restez dans vos années 80 et faîtes pas chier ceux qui ont évolué dans leur manière de voir le futur. Aujourd'hui le futur est vu comme un monde aseptisé, froid et très « clinique » dans son esthétique, j'en veux pour preuve toutes les anticipations de ces dernières années (Oblivion (si si, regardez les « bureaux » dans lesquels évoluent les techs, c'est la même chose), Antiviral – dont j'avais fait une critique si je puis me permettre ce petit moment de pub – I robot, Time Out, Wall-E, Moon, etc, etc). Cette ambiance est, je trouve, très angoissante si bien amenée et maîtrisée, cette sensation du toujours propre est assez dérangeante par son caractère très manipulateur vis-à-vis de son monde qui consiste à rendre glamour la plus dégueulasse des choses. Et Antiviral a d'ailleurs réussi sur ce point, preuve que ce n'est absolument pas un argument pour défoncer un film. Et on va même pas parler des critiques sur l'armure, mon dieu... Les mecs, faut évoluer. Encore une fois, regardez les films sur la robotique anthropomorphique et vous verrez, qu'aujourd'hui, le « RoboCop » actuel correspond à la vision que s'en font les gens (I Robot, toujours, est un bon exemple), nan attendez, j'ai même mieux comme argumentaire : regardez la robotique anthropomorphique actuelle (ou même les robots de l'armée américaine actuels), entre le RoboCop 2014 et celui des années 80, y en a qui pensent réellement que l'avenir de la robotique se dirige vers le modèle des années 80 plutôt que l'actuel ? (Attention, je ne dis pas que l'ancien est mauvais ou dépassé, j'adore RoboCop premier du nom (il fait même partie de mon top films pour ceux qui s'y seraient attardé), et je prétends pas connaître le futur. Mais bordel, c’est le but d'un remake de réactualiser son sujet, la technologie a évolué, la robotique aussi, vous vous attendiez à quoi ? Une copie de l'originale en faisant une œuvre totalement anachronique ? Vive l'innovation et le progrès dis-donc ! On va quand même pas reprocher à un film d'être ancré dans son époque.
Alors oui, il est PG-13, et alors ? Donc, pour certains, RoboCop c'est qu'une histoire de sang et de membres arrachés ? Okay, donc vous avez pas « totalement » compris le film, en fait.
Alors oui, les studios ont tendance à agir comme des gros connards et ont tendance à agir de manière quelque.. douteuse. Attitude,qui consiste, grossièrement, à répéter en boucle : « Continuez à gueuler sur votre internet bande de connards, on sait que vous irez le voir quand même! » Bah oui, mais ils ont raison, on va le voir, pourquoi se plaindre d'un système si c’est pour le nourrir ? Ca fait 30 ans que c'est comme ça (bon, à l'époque y avait pas tellement internet, mais l'idée de base est la même), pourquoi faire semblant de découvrir le problème et d'en faire un argument spécialement contre ce film ? C'est valable pour des tonnes d'autres films, pourquoi s'en servir contre celui-ci précisément ?

Enfin bref (*), vous l'aurez compris, moi j'étais enthousiaste à l'annonce du projet, j'attendais énormément ce film, j'étais en total désaccord avec le reste de l'internet et en plus je suis fan du travail de Padhila. D'ailleurs, le choix de ce réalisateur est quand même le signe d'un grand respect de l'œuvre originale de la part du studio, ils auraient pu embaucher le dernier des connards tel un John Moore ou un Marc Forster qui n'est là que pour faire le job, mais non, ils sont allé chercher un mec qui a une filmographie proche de Verhoeven par ses thématiques et sa violence graphique, qu'est-ce qu'il vous faut de plus ?
*: (vous noterez l'ironie profonde et le côté particulièrement hypocrite de ce « bref » placé juste après un pavé indigeste et aigri, mais passons)

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Donc, passons au film et à la critique argumentée et stoppons tout ce procès d'intention et ces questionnements vaseux.

Déjà, il est quand même TRES difficile de se défaire de l'adaptation de Verhoeven, parce que même avec tous les efforts, le film nous le rappelle constamment et ce même depuis le début puisque la scène d'ouverture n'est autre chose qu'un JT, gimmick très présent dans le film de Verhoeven tant dans sa construction narrative que dans la ou les réflexion(s) associée(s) vis-à-vis de la population face aux médias et du contrôle de ces derniers par des multinationales. Mais ce JT n'est pas inintéressant et ne contente pas de copier Vehoeven, il me rappelle d'ailleurs très fortement les émissions brésiliennes choc qu'il [Padhila] avait déjà présentées dans son « Tropa de Elite 2 » avec le personnage de Fortunato. Et je trouve au final ce parallèle très intéressant, placer la situation de la violence américaine dans un contexte aussi proche que la situation brésilienne peut être vu comme une certaine critique d'un ethnocentrisme occidental vis-à-vis de la violence mais aussi tout simplement donner une certaine force évocatrice de la situation.
Le JT est donc en duplex sur une intervention militaire en Iran où les machines de guerre américaines dominent le terrain faisant ainsi de cette guerre, une guerre « propre » avec zéro victimes (d'un seul côté, évidemment), mais qui inévitablement va déraper car fera l'objet de multiples attaques suicides (où les terroristes auront compris la mesure de l'importance des médias dans notre société – ce qui est déjà le cas de nos jours par ailleurs) et mettra à mal la réputation de l'OmniCorp qui veut introduire ces robots à un usage domestique. Ce qui va être compliqué puisque qu'elles abattent des enfants en direct .

Donc, ce JT, vous l'aurez compris, je le trouve très intéressant et très bon. Mais il est aussi symptomatique du problème principal du film, à savoir : « Pourquoi le film ne marche pas avec la même force que le premier ? ». Le film n'est pas pareil par ses intentions, mais pourtant on a jamais l'impression de découvrir autre chose Il n'obéit pas aux mêmes règles, les univers étant différent, les personnages étant différent, le ton donné étant différent. Même le contexte de création du robot est quand même assez différent du premier (dans le premier ce n'est justifié que par la violence présente dans le ville et uniquement ça, là il ne s'agit véritablement que d'un acte commercial, rien de plus), mais n'est pas assez éloigné pour être totalement dissociable. Les thèmes ne sont pas les mêmes (évidemment, il y a des points communs, la force des médias, l'insécurité – quoique pas tellement celui-ci en fin de compte – la dualité homme/machine, etc) et font l'objet d'un traitement très différent. Mais pourtant, j'ai l'impression de déjà connaître le fond de la satire. Et ça m'a beaucoup gêné. On reviendra sur ce point un peu plus tard, j'y tiens.

Une fois passé ce JT, on embraye sur le titre du film et le thème de Pouledoris « dubstepé » pour l'occasion, et qui je dois dire, chie plutôt la classe.

On découvre Murphy joué par Kinnaman (si vous n'avez pas regardé The killing, il est temps de vous y mettre), qui revient d'une mission où il s'est fait légèrement désossé, entre dans le bureau de sa chef, s'embrouille avec deux flics un peu connards sur les bords, nous expose la situation : lui être infiltré, moi avoir trouvé réseau dangereux avec possiblement flic ripoux, moi être assez stupide pour y être allé seul avec mon collègue, nous s'être fait avoir parce que taupe dans le commissariat, mon coéquipier est à l'hosto.

Je vous laisse vous remettre de ce torrent d'originalité pour vous préparer la révélation suivante (attention à la crise cardiaque) : les deux flics connards sont les ripoux !
Les deux flics connards sont donc dans la merde si Murphy les balance et décident de le tuer. Ce qu'ils vont louper, mais va sérieusement l'amocher.

Alors déjà, okay c'est pas très original, mais ça ne fait que 5 minutes et ce n'es là que pour fournir le contexte de base, donc on peut passer outre. Mais ce qui est novateur, c'est que dans ce film, la famille de Murphy est montrée dès le départ, d'ailleurs Murphy n'est pas choisi par l'OCP en le transférant dans un quartier de merde mais est déjà présent dans ce quartier et l'OCP ne s'approprie pas le corps, mais c’est la femme de Murphy qui décidera de la participation de son mari à ce programme.
Plusieurs personnages sont assez ambiguës par leurs intentions, le docteur Frankens... euh Norton pardon, qui oscille constamment entre l'empathie envers sa création qu'il considère comme humaine et la volonté de voir son programme médical prospérer (ce qui demandera comme sacrifice de rejeter la plupart de ses principes moraux), il maltraitera RoboCop à plusieurs reprises, mais on ne sait jamais si ces raisons sont les siennes ou celles que lui dictent l'OCP. Forcé de les accepter ou pleinement conscient de ses actes ?
Le traitement de la famille de Murphy avec l'arrivée du père robotisé. On notera toute la subtilité qu'il y a à montrer un homme-machine qui revient à la maison meurtri par l'explosion d'une bombe, où tout dans la mise en scène me fait penser à un blessé de guerre qui rentrerait à la maison. Dans une société marquée par l’Afghanistan et l'Irak, c'est pas des plus anodins et c'est pourtant très subtil.
Le traitement de Murphy est pris très au sérieux (la scène de la « déconstruction » et sa demande d'euthanasie sont assez parlante), c'est un réel travail sur le libre arbitre, son interprétation et sa mise en œuvre dans le cadre de la sécurité ou du domaine militaire.

Je vais pas faire une analyse complète après un seul visionnage, mais juste pour dire que le film regorge de trouvailles, regorge de thématiques nouvelles ou alors utilisent celles de Verhoeven pour se les réapproprier et les retravailler.
Plus haut, je dis qu'on a jamais l'impression d'innovation dans les thèmes, mais c'est très clairement une fausse-impression. Fausse-impression laissée par l'empreinte du premier et les clins-d'œils beaucoup très présents qui ne nous laissent jamais nous défaire du film de Verhoeven.
Mais sachez que ce n'est pas une copie du premier. C’est un putain de film innovateur, qui a ses propres envies et qui les dit, qui a ses propres sous-entendus qui trouvent très leur écho dans la société actuelle.
Ce film est bon, il traite son sujet au sérieux, il aime son personnage et a voulu réellement le travailler.
Des défauts sont certes présents, le méchant très méchant qui veut pas de RoboCop (parce quoi au juste?), l'histoire bateau avec les flics ripoux (mais encore une fois, c'était du contexte), le fait que le film verse trop dans le film d'action (alors que c'est clairement mieux géré dans le Verhoeven) ou la musique pompière légèrement relou ou même un rythme en dent de scie.

Mais je trouve qu'il y a un réel sérieux dans ce projet, une implication du réalisateur (qui certes a visiblement été bridé par sa hiérarchie apparemment) qui a su donner un souffle autre que de faire une simple reprise sans âme et a su donner une interprétation de l'univers RoboCop ma foi correcte.

Je pense qu'il est malgré tout important de se faire un second visionnage pour mesurer toute la portée du film et de le voir en tant que tel en occultant le RoboCop 87, ce qui explique ma notre frileuse de 6 malgré que j'en dise le plus grand bien.
JayJays
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le 16 févr. 2014

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