Rogue One est une cruelle déception.


Alors que nos amis outre-atlantiques étalaient leurs avis dithyrambiques, clamant haut et fort que Rogue One était différent, épique, plein de bonnes surprises et non-consensuel, mon appréhension certaine s'effaçait pour céder la place à une hype tout à fait irraisonnable et non-contrôlée.


Cons de ricains, c'est la dernière fois que je prête un quelconque intérêt à votre enthousiasme immodéré.


Pourtant le film démarre fort et semble avoir la volonté et les moyens de s'extirper du carcan de l’univers cinématographique Star Wars conventionnel : notre premier contact avec la Rébellion se fait auprès de Kassian, qui abat de sang froid un de ses indicateurs.
De quoi remettre fondamentalement en cause la droiture inflexible et vertueuse d'un mouvement contestataire beaucoup trop sage et manichéen pour être honnête. Quelques minutes plus tard, jubilation : on apprend l'existence d'un schisme au sein même du mouvement, entre la branche modérée et une branche dissidente beaucoup plus radicale et extrémiste menée par Saw Gerrera (au nom incroyablement subtil...).
Le film poursuit sa prise de position et se permet même une politisation inattendue avec la mise en scène d'une guérilla urbaine sur Jeddah. Un combat acharné entre les opprimés (une intifada) et l’oppresseur impérialiste (américain) présent sur une planète semblable aux pays du moyen-orient, dans le seul but de piller les ressources locales nécessaires à l'alimentation de sa machine industrielle. D'un coup d'un seul on a l'impression d'assister à la maturité de l'univers Star Wars. Finie cette analogie avec les régimes fascistes et totalitaires faciles et sur-utilisée, place à l'autocritique.
Je jubile, dans mon siège, pensant voir se réaliser ce que je n'espérait plus des films Star Wars. Puis Jeddah est détruite, et je commence à déchanter.


Pourquoi avoir pris tant de temps à exposer un contexte politique complexe pour le mettre à l'écart d'un revers de la main ?
Pourquoi retomber dans cette sempiternelle quêtes du père et de la réparation de ses erreurs ?


On espère alors que les intrigues et les conflits d'intérêts au sein de l'empire, entre Kremmnic et Tarkin, vont réussir à compenser l'abandon de cette voie pourtant extrêmement alléchante, mais il n'en est rien, en dehors d'un faux espoir.


Alors que Rogue One semblait viser grand, il retombe dans les travers d'une quête du héros lambda, dont la structure usée jusqu'à la corde fatigue tout autant le spectateur.


Il ne reste guère alors que la mise en scène de Gareth Edwards pour disséminer ça et là quelques superbes plans aux effets d'échelles particulièrement réussis pour empêcher l'enlisement, à l'image de ce traumatisme de l'Histoire Sans Fin, d'un superbe étalon sombrant dans les marais du consensuel et de l'ennui.
Car ce sont pas l'attachement aux personnages mal développés et peu attachants, ni les batailles spatiales invraisemblables (sérieusement, les Hammehead ?), ni la rigidité archaïque des AT-AT, ni les visages mocapés de Tarkin et Leïa (bonjour l'uncanny valley), ni même les caméos putassiers (mais jouissifs) de Vador qui vont donner de l'intérêt à un film qui se saborde de la sorte au bout d'une heure à peine.


Un grand gâchis, le potentiel était pourtant énorme.

YvesSignal
7
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à ses listes Les meilleurs films de l'univers Star Wars et Les meilleurs films de 2016

Créée

le 9 janv. 2017

Critique lue 246 fois

1 j'aime

1 commentaire

Yves_Signal

Écrit par

Critique lue 246 fois

1
1

D'autres avis sur Rogue One - A Star Wars Story

Rogue One - A Star Wars Story
guyness
6

Jeux de lumières, parts d'ombres

Il y a quelque chose de presque magique dans la faculté qu'ont les scénaristes (ils s'y sont mis à quatre ici) pour faire d'une simple phrase dans l'épisode IV un scénario qui tient assez bien la...

le 14 déc. 2016

179 j'aime

39

Rogue One - A Star Wars Story
Gand-Alf
8

Sans retour.

Il va falloir se faire une raison, plus aucun Star Wars ne sera fébrilement et longuement attendu comme ce fut autrefois le cas, le fan devant patienter au minimum dix ou quinze ans pour avoir sa...

le 21 déc. 2016

96 j'aime

17

Rogue One - A Star Wars Story
Velvetman
6

Tropa de Elite

Qu’on se le dise, Hollywood avance ses pions avec ses grandes sagas ou ses grosses franchises mais détourne son regard par des chemins de traverse différents. Au lieu de mettre les pleins phares sur...

le 17 déc. 2016

92 j'aime

3

Du même critique

Sekiro: Shadows Die Twice
YvesSignal
10

De gifles et de crocs

Trente-deux heures. Il m'aura fallu trente-deux heures pour arriver aux crédits de Sekiro : Shadow Die Twice. Trente-deux heures en deux jours, pour être plus précis. Je viens de vivre une tranche de...

le 27 mars 2019

45 j'aime

22

Wolfenstein II: The New Colossus
YvesSignal
8

Prendre du plomb dans le ciboulot

Relecture pulp décomplexée du précurseur des jeux d'action à la première personne - que beaucoup prétendent adorer mais auquel personne n'a jamais véritablement joué - The New Order, malgré une...

le 6 nov. 2017

25 j'aime

1

Apex Legends
YvesSignal
9

Dans la famille des BR, je demande le plus affuté

Genre phare de 2018, mais pourtant déjà largement saturé, la famille des Battle Royale n'a cessé de s'agrandir, accueillant toujours plus de rejetons, pas nécessairement bien portants. Largement...

le 12 févr. 2019

21 j'aime

6