"Le grand frère" élevé en mythe !

La vie n'est, somme toute, qu'une succession de périodes charnières à traverser, dépasser, intégrer.
La plus difficile ? De loin celle où l'on ne sent plus plus vraiment un adolescent... sans être encore vraiment un adulte. Grosso modo, la génération des 15-20 ans, pour qui la recherche désordonnée d'une personnalité se traduit en général par un rejet plus ou moins brutal des valeurs, règles et codes en place.
La jeunesse en révolte : un thème qui a été souvent traité par le Cinéma et qui a donc ses classiques. Francis Ford Coppola, qui après son coup d'éclat du "Parrain" n'a plus jamais raté une occasion de se distinguer, lui, est même allé jusqu'à signer deux films coup sur coup !
Tourné dans la foulée de "Outsiders" et totalement différent bien que réalisé avec la même équipe technique et les mêmes jeunes acteurs, ce fut ce "Rusty James". Du nom du personnage central, teenager très représentatif de la jeunesse américaine telle que l'ont mythifiée les fameuses années 60. "Mythifiée" renvoyant aussitôt à mythe, notion qui justement imprègne tout le film, en lui conférant une rare densité.
Mal dans sa peau et dans sa tête, cultivant sa virilité à défaut de projets d'avenir, Rusty James s'est, comme beaucoup, choisi une idole, un modèle. Et quand on a comme lui un frère plus âgé de 4 ans, qui est entré dans la légende urbaine du quartier sous le flamboyant surnom de "Motorcycle boy", l'idole est toute trouvée.
On n'en finira jamais d'explorer l'étonnante fascination qu'inspire "le grand frère", cet être qui suscite à la fois jalousie et admiration. Or, Coppola, avec ce film, le fait avec ce qu'il faut bien appeler de la maestria. Cadrages et mouvements de caméra n'en finissent pas de sublimer le récit, au classicisme rehaussé par l'utilisation parfaite du noir et blanc (couleur n'intervenant que le temps d'un remarquable trucage).
Son film est devenu, pour ses inconditionnels, un must du genre. Au même titre que "La fureur de vivre", c'est dire !
Rusty James, ce jeune naufragé de la vie qui se raccroche désespérément au culte de son frère comme à une bouée, c'est Matt Dillon. Un physique de petite frappe à belle gueule et un talent cognant à la porte de la notoriété explosive.
Mais la vraie, puissante et fascinante surprise, c'est Mickey Rourke qui l'incarne en Motorcycle boy. En campant, avec sobriété et surtout ce qu'il faut de détachement, un rêveur suicidaire, il est la personnalisation même d'un autre mythe - on y revient - à succès, celui du loser (perdant) ! L'anti-héros dont la grande, irrémédiable vulnérabilité fait paradoxalement l'éternelle séduction.

Ticket_007
8
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à ses listes Les films qui ont changé votre vie, * Quand Mickey était maousse ! et * Fan des années 80 !

Créée

le 24 mars 2017

Critique lue 399 fois

12 j'aime

7 commentaires

Ticket_007

Écrit par

Critique lue 399 fois

12
7

D'autres avis sur Rusty James

Rusty James
0eil
9

Critique de Rusty James par 0eil

Après une longue discussion ayant pour thèmes les Parrains que je venais de découvrir et mon admiration pour le Mickey Rourke des années 80, magnifique dans Angel Heart, on me conseilla Rusty James,...

Par

le 3 févr. 2011

44 j'aime

1

Rusty James
Sergent_Pepper
8

“Well, you're better than cool. You're warm.”

Après Coup de Cœur, expérimentation kitchissime et Outsiders, première incursion du côté de la jeunesse désœuvrée, j’attendais le pire de Rumble Fish. Long clip à la plastique parfaite, d’un superbe...

le 1 déc. 2013

36 j'aime

7

Du même critique

Qui veut la peau de Roger Rabbit
Ticket_007
9

Comédie policière et cartoon dopés par une "Fantasia" d'effets spéciaux

Un détective privé s'immerge dans le Hollywood de l'après-guerre, pour enquêter sur la brouille entre un acteur célèbre et sa femme. A peine a-t-il ciblé un potentiel rival que celui-ci est...

le 19 mai 2016

50 j'aime

8

L'Été meurtrier
Ticket_007
7

"Identification d'une femme"... vengeresse !

"L'Eté meurtrier" est resté à l'état de projet trois ans. Le temps qu'Adjani se fasse à l'idée d'endosser les habits d'une jeune femme ayant pour caractéristique sautant aux yeux de ne porter que des...

le 3 oct. 2015

43 j'aime

13

Les Ailes du désir
Ticket_007
9

Envolées en "eaux profondes" du Moi

Attention, chef-d'oeuvre ! Attention, danger ! Parce que "Les ailes du désir" est un spectacle anti-spectaculaire au possible, pour approcher cette vérité inconfortable : vivre en le sachant. On sort...

le 16 juin 2016

40 j'aime

22