Un film en demi-teinte, dirai-je, dont le propos dépasse, à mon sens, la réalisation. C'est un beau film, simple, avec une ambiance pauvre, un décors basique, une bande-son à peine mémorable. Pas de place pour les fioritures, ce qui met en avant l'intrigue ou plutôt le sujet phare : la différence, ou plus précisément, la discrimination envers ceux qui ne sont pas comme nous, qui sortent du moule social, qui sont hors de la normalité rabachée à longueur de journée.


Nous voilà dans une famille homoparentale, dans les années 90, aux Etats-Unis. L'un des hommes, Malik, est tourmenté par un passé de haine envers ce qu'il est, ce par quoi les gens le définissent, son orientation sexuelle, bien qu'il ait fait le choix de s'affranchir de la peur du jugement. L'autre homme, Aaron, cherche avant tout un peu de stabilité, de tranquillité, loin des persécutions, il veut de la normalité. Quand à Kayla, fille d'Aaron et d'une femme - dont on ne saura rien mis à part qu'elle n'a pas l'air digne d'être mère (pour rappel, un homme et une femme ne sont pas forcément l'équation idéale pour élever un enfant, tandis que l'amour, lui, est indispensable) - elle semble subir elle aussi la différence de sa vie de famille. Mais justement, cette famille emménage ailleurs, là où ils pensent être loins des emmerdes. Vous vous doutez bien que ce ne sera pas le cas.


Justement, en parlant de doute... Beaucoup de choses sont prévisibles dans ce film. L'on sait dès sa première réplique que la voisine aura un rôle d'antagoniste dans cette histoire. Parce que c'est le schéma habituel des films d'épouvante où les nouveaux venus sont forcément mal aimés par les riverains. On se doute également que le couple ne tiendra bientôt plus qu'à un fil et qu'il suffira d'un coup de ciseau pour le briser. On se doute aussi que le garçon qui tourne autour de Kayla n'a pas des intentions louables, etc. Trop facile de faire passer l'un des deux amoureux pour un fou auprès de l'autre, à partir du moment où il garde pour lui tout ce qui aurait pu les aider à s'en sortir. Alors que ce comportement est très peu crédible.


En fait, trop de ficelles connues du genre sont réutilisées, et c'est pareil dans la réalisation : la caméra qui tourne sur elle-même, latéralement, avec une lenteur fatiguante et une musique qui ne devient oppressante que parce que le volume augmente crescendo... En soi, c'est une bonne idée, mais pas trois ou quatre fois dans un film de moins d'1H30.


Par contre, je salue la mise en forme métaphorique de la spirale qui ne se dévoile que dans le dernier tiers du métrage et qui donne un sens encore plus fort au film. La spirale, synonyme d'une boucle sans fin, qui à travers le temps (tous les dix ans), nous voit reproduire les mêmes foutues erreurs de jugement, exactement comme le prouve l'Histoire. Ca donne la chaire de poule d'imaginer que la civilisation n'évolue pas, et que même si petit à petit un est peu plus tolérants envers une minorité qui a été trainée dans la boues (littéralement) pendant des dizaines, des centaines d'années, de nouvelles "minorités" voient le jour au fil du temps et patissent d'un sort aussi funeste. Le propos du film est fort, peut-être pas novateur, mais il est traité avec nouveauté. Et faire un zoom sur l'homophobie est forcément une très bonne idée.


Les acteurs sont bons, bien que ma préférence aille à Jeffrey Bowyer-Chapman (Malik) qui ne tombe jamais dans le cliché. Amusant d'y retrouver Lochlyn Munroe (Marshal) dont j'ai vu le jeu pour la première fois dans le 1er Scary Movie, en 2000. Son rôle lui sied bien, il est convainquant.


Enfin, le film joue beaucoup avec le non-dit, le mystère et le flou, ce qui le rend, pour moi, insatisfaisant. Ce n'est pas la fin "ouverte" qui m'embête, c'est plutôt le fait de ne pas expliquer certains faits, de laisser une part trop importante à l'interprétation du spectateur qui ne trouvera d'ailleurs pas de réponse à tout. Par exemple :


Pourquoi ces gens sont-ils immortels ? Pourquoi le rituel a-t-il lieu tous les dix ans ? Comment peuvent-ils prévoir qu'une famille "différente" viendra s'installer dans leur village ? De quoi doit réellement se nourrir le garçon-vampire ? De coeur jeune ? De coeur de fille ? De coeur de vierge ?


Trop de questions sans réponses qui font du fantastique un fourre-tout.

abauteure
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le 1 août 2021

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