Mixer un thriller psychologique complexe à une intrigue de science fiction, franchement je trouvais que le pari n'était pas gagné d'avance ! Pourtant Trier l'a, en apparence, plutôt réussi. Dès la première scène, le ton est donné : une bonne crème glacée au goût doux-amer. On se réjoui d'y goûter.


Les effets de lumière et de son nous promettent un grand spectacle plutôt moderne et plein de suspens. Certes le suspens est bien là. Le parchemin de l'intrigue se déroule tout doucement pour nous dévoiler, toute les deux scènes à peu près, un nouvel élément de "l'enquête" que poursuit le spectateur. Une enquête qui par moment nous paraît sans fin ! On ne sait plus délier ce qui relève de l'important de ce qui est quasi superficiel. De ce point de vue, certains dialogues nous paraissent infiniment longs et ennuyeux (la faute au doublage ?). Je parle plus particulièrement des scènes de conversation téléphonique qui sont insupportables, ou de la scène de face à face entre Thelma et le médecin neurologue qui ressemble à ça :



  • Si la courbe avait été plus haute ça aurait voulu dire que votre crise était de l'épilepsie.


  • Ça veut dire que ce n'était pas une crise d’épilepsie ?"



Et là, j'ai pensé à voix haute : Bravo Thelma, c'est ce que le monsieur vient de te dire. Je pense que tu auras ta licence en biologie !


Pourtant... certaines scènes sont presque transcendantes et sont servies par des effets spéciaux simples, efficaces et sublimes. Trier est un grand métaphorique ! Il se sert des fantasmes désirés de Thelma (La convaincante Eili Harboe) pour en faire des images qui ravissent les yeux et vous font penser : Ça c'est du génie. Je fais référence notamment au serpent, la personnification du mal tant connue des croyants que des athées, qui apparaît ici aussi sensuel que malsain.


Sans compter que le film aborde tout un tas de questions qui ont leur place dans notre société d'aujourd'hui : la croyance (que ce soit en dieu, en la technologie ou en les lobbies...), la différence (l'homosexualité en fait), le refoulement (l'inconscient) et le pouvoir de nos envies. Car si Thelma attire à elle se qu'elle désire -Anja alias Okay Kaya, entre autre- et efface ce qu'elle souhaite exclure comme si toute la vie autour d'elle n'existait que dans sa tête, c'est parce que nos sociétés sont dirigées par notre égoïsme. Depuis toujours l'homme ne vit pas pour subvenir à ses besoins mais pour assouvir ses désirs et Thelma ne semble pas l'assumer.


Entre l'ennui et le frisson, entre la lenteur et la montée en pression, et même entre le ridicule (parfois) et le malaise, Trier nous livre un long-métrage largement inégal, très hétérogène, mais avec un fond de réflexion que j'affectionne particulièrement. C'était une découverte à faire !


Et pour ceux qui aime comparer Thelma à Grave, j'ai envie de leur dire que ça n'a rien à voir. Les deux héroïnes ne se ressemblent pas, et chaque réalisateur à choisit de pousser une thématique plus que les autres. Si pour Grave c'est la découverte de la sexualité et d'une nature canibale, pour Thelma c'est davantage l'attrait du plaisir et du désir vu comme un mal.

abauteure
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le 24 nov. 2017

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