Le film commence comme un affreux clip MTV mais on finit par se dire que cela sert son propos...
Korine ne berne pas son spectateur car ce dernier peut y voir ce qu'il a envie de voir : la mise en scène est tellement fantasmatique que l'on finit par se perdre temporellement (avec le mixage du film) et à se situer entre l'imaginaire et la réalité, notamment vers la fin (qui est mort ? qui est vivant ? Où s'arrête le fantasme et quand recommence la réalité ?)
Un Spring Break, quatre filles dont trois p*tasses, un malfrat au pseudonyme le plus simpliste qui soit. Alien est le personnage le plus consistant et intéressant du film, car ses motivations envers les héroines sont mystérieuses et car il est l'antithèse de son modèle (Tony Montana) issu de son film préféré, et il le sait (comme le prouve son anxiété à devoir affronter son ennemi, et les conséquences qu'il en tirera font de son adversaire Montana, et non lui..). D'ailleurs, contrairement à toutes les petites frappes du deal, on ressent une certaine mélancolie chez lui. Derrière son pseudo ridicule, ses dents en argent et ses deux petits chiens jumeaux affreux se cachent une certaine tendresse envers ces filles, qu'on lui soupçonnait de ne vouloir que bai*ser. En fait, le seul point commun qu'il a avec son idole Scarface, c'est qu'il paiera le prix pour sauver une âme "innocente".
Et les quatre filles justement. La seule se démarquant vraiment du lot est Selena Gomez, une chrétienne, la seule brune parmi les blondes, la seule à avoir ses limites dans le plaisir mais manquant trop d'assurance pour freiner les rêves surréalistes de ses amies. Les trois blondes ne se distinguent pas, elles sont toutes identiques et superficielles, le spring break est la seule chose trépidante qu'elles ont faite durant leur existence. D'ailleurs, l'ambiance de ce Spring Break est très caméléonienne : festive, bien arrosée, mais derrière tout ceci se cache une mélancolie, une tristesse, un mal-être dès qu'ils s'éloignent du brouhaha ambiant. Tous savent que ce ne sera qu'un souvenir, qu'une parenthèse dans leur vie aussi brève que l'hédonisme qu'ils auront cherché.
Au fond, Harmory Korine n'a pas trompé le public mais ne manque tout de même pas de cojones, il a pris le risque de créer trois personnages principaux inexistants, identiques, d'utiliser des musiques qui ne plairont pas à un grand nombre d'entre nous (moi le premier) mais nécessaire pour l'immersion dans cette faune d'étudiants, et toute une ribambelle de clichés sur ces derniers. Avec ces couleurs rêveuses et fluos, cette atmosphère planante, ces mouvements aguicheurs mais ô désincarnés, cette recherche du vide total que veulent vivre les personnages, Spring Breakers est un vrai champignon hallucinogène, et l'effet est davantage réussi quand nous appartenons à la même génération de ces personnages.
MrOrange
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le 4 août 2013

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